18 novembre 2006

Les militants socialistes disent oui à Ségolène

Le PS dit Oui à Ségolène

Ségolène Royal a gagné l’investiture du PS en remportant la majorité des voix des adhérents socialistes. Comme prévu à l’origine par ses initiateurs, François Hollande et François Rebsamen, l’opération « nouvelles adhésions » au cours de l’année 2006, a bien porté ses fruits puisque ces nouveaux adhérents «soldés à 20 €» ont choisi largement Ségolène.

Ses deux challengers, Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn, qui ont déjà exercé de hautes fonctions ministérielles (1er Ministre pour l’un et Ministre des finances pour les deux), n’ont pu finalement résister à l’attrait de la nouveauté et de la féminité.

Ségolène va devoir gagner maintenant les voix de tous les électeurs socialistes, notamment les partisans du Non au TCE le 29 mai 2005, afin d'assurer sa présence au second tour de l'élection présidentielle puis d’affronter son adversaire dans les meilleures conditions possibles.

Mais si l’exercice est périlleux, sa popularité conjuguée à la division entre sarkozystes et chiraquiens, pourrait éventuellement lui faciliter la tâche pour accéder à la Présidence de la République...


Remarquée à l’origine par Jacques Attali, Ségolène est conseillère technique au secrétariat général de la Présidence de la République de 1982 à 1988, chargée d'abord de la jeunesse et des sports puis des affaires sociales.

En 1988, elle est "parachutée" par François Mitterrand dans les Deux-Sèvres et élue députée de la 2ème circonscription de Saint-Maixent-l'École.

Plusieurs fois ministre, de l’Environnement puis des Affaires scolaires et de la Famille, présidente de région depuis 2004, il n’est pas étonnant, qu’après un tel parcours, elle se soit lancée dans la campagne présidentielle en créant sa propre association, Désirs d’Avenir, en marge du PS. Mais il est difficile de croire qu'elle apporte aujourd’hui un renouvellement réel d’un système politique verrouillé depuis tant d’années.

En avançant notamment l’idée de «jurys de citoyens», Ségolène Royal a passé sous silence l’absence de vraie représentation des citoyens au parlement et la nécessaire réforme des institutions de la 5ème République et de ses différents échelons administratifs. 

La France est en effet un des rares pays à fonctionner avec autant de structures administratives superposées tels que commune, communauté de communes, pays et enclaves, département, région, conseils municipaux, conseils intercommunaux, conseils généraux, conseils régionaux, sans oublier le découpage contestable des circonscriptions pour les élections législatives, grandes circonscriptions pour les élections européennes, secteurs ou arrondissements pour les élections municipales, cantons pour les élections cantonales, collège de 150 000 grands électeurs pour l’élection des sénateurs, etc.

Au lieu de penser à faire contrôler les élus par des jurys populaires, il conviendrait mieux de modifier en profondeur toutes ces structures et découpages de toute sorte, souvent séculaires, dont les lourdeurs nuisent à la vie démocratique et à la mise en œuvre rapide des décisions économiques ou sociales.

Pendant toute la durée de la campagne interne au PS, Ségolène n’a pas non plus rappelé solennellement que la diversité des opinions des citoyens, même les plus extrêmes, devait être représentée dans les deux chambres parlementaires de la République, grâce à la proportionnelle, au plus grand profit du débat démocratique et du contrôle démocratique des élus.

Par contre, sur le plan sociétal, Ségolène a toujours apporté une attention particulière aux problèmes des jeunes : souci de la qualité de la nourriture dans les établissements scolaires, de la protection des enfants devant la violence de certains programmes télé, pilule du lendemain pour les adolescentes, etc.

Mais si un certain nombre de ses initiatives passées allaient dans le bon sens, il n’en est pas de même de sa dernière proposition d’encadrement militaire pour les jeunes délinquants et de la notion «d’ordre juste», mis un peu à toutes les sauces…

Hormis que cette notion est plutôt de droite, comme le disait Bourdieu dans une vidéo récente sur internet, c’est surtout une idée religieuse, pas une idée politique ; c’est en fait une expression dont l’origine remonte à une encyclique du pape Benoît XVI.

L’ordre juste, c’était notamment les enfants dans les maisons de redressement et les pauvres placés sous contrôle, en fait les idées les plus banales de la bonne société du 19ème siècle… 

De tels centres ont de plus existé de 1986 à 2004 et un rapport parlementaire en a dressé un bilan catastrophique, sous la plume notamment d’un de ses soutiens, en la personne du sénateur de la Moselle Jean-Pierre Masseret ! Sur 5 800 jeunes, plus d’un tiers s’évadaient ou étaient expulsés. Pour les autres, moins d’un sur deux échappaient finalement à la criminalité !

Ségolène a cru bon d’y ajouter de surcroît la suppression des allocations familiales pour les plus démunis, reprenant en cela les propositions de Nicolas Sarkozy.

il est indécent de présenter la mise sous tutelle des allocations familiales comme une mesure pour «aider les pauvres» sans parler du vrai scandale consistant à attribuer ces allocations sans aucune condition de ressources, aux riches comme aux pauvres, aux millionnaires en euros comme aux smicards, sans compter les familles avec un seul enfant qui n’en bénéficient même pas…

Sur le plan international, Ségolène a un penchant pour le «blairisme» qui serait globalement positif...On cherche en vain où est l’action positive de Tony blair après son soutien inconditionnel à la politique de Bush en Irak, sa proposition d’allongement à 68 ans de l’âge légal de départ à la retraite ou son projet de privatisation des écoles publiques ?

Enfin, concernant plus particulièrement l’Europe, Ségolène a participé activement à la campagne "naïve" du PS en faveur du Oui au TCE en 2005.

Et c’est sans doute ce dernier point qui constitue sa principale faiblesse. Avoir défendu une conception libérale de l’Europe, largement responsable des dégâts qu’elle dénonce par ailleurs et notamment des salaires tirant vers le bas, ne semble pas la meilleure façon de gagner toutes les voix de l’ensemble des électeurs de gauche.

Face vraisemblablement au candidat de l’UMP, partisan lui aussi du Oui au TCE, il ne suffira pas de s’habiller en tailleur blanc, il faudra aussi convaincre celles et ceux qui ont dit Non à ce traité libéral, écrit sous l’égide de Valéry Giscard d’Estaing… 

 

Résultats du vote interne au PS :

Inscrits : 220 269 / Votants : 180 558 (81,97%) / Nuls et blancs : 1 145 (0,63%)

Ségolène Royal : 108 807 (60,65%)

Dominique Strauss-kahn : 37 118 (20,69%)

Laurent Fabius : 33 487 (18,66%)


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14 commentaires:

Anonyme a dit…

Je rends ma carte du PS. J’ai adhéré il y a six mois pour désigner le candidat à la présidentielle socialiste.

Les socialistes ont voté par suivisme. Ils ont suivi les sondages. Ils ont suivi leurs bas instincts, négligeant les bourdes de leur candidate.

Oubliées, les déclarations, identiques à celles de Georges Bush avant sa défaite monumentale aux élections du mid term, selon lesquelles l’Irak se relevait.

Oubliées, les déclarations sur la paresse supposée des professeurs. Oubliés, la victimologie quasi christique, l’autoritarisme dictatorial, l’autisme intellectuel.

Balayé, le souvenir de cette réponse méprisante à une jeune militante sur la dérive droitière du discours.

Que veulent-ils, ces socialistes? Surmonter la honte du 21 avril 2002 et du 29 mai 2005. Passer le premier tour. Tant pis si la candidate est médiocre et populiste.

Edmond a dit…

Ségolène maintenant élue, passe au premier rang de la vie politique et peut changer le destin de la France.

C'est une image, mais c'est celle de la réalité.

Hier il y avait 3 présidents potentiels, aujourd'hui il n'y en a qu'un. Ça fait une différence quand même !

Adeline a dit…

Ce siècle est enfin celui des femmes, la large victoire de Ségolène Royal en est la confirmation ! Bravo à elle, et tant mieux pour nous ! Enfin, un autre regard sur la politique avec cette femme ! Elle a une approche nouvelle.

Elle n'a pas, à l'avance, décrété ce qui sera bon pour les Français comme cela a toujours été le cas jusqu'à maintenant, mais elle a le bon sens d'interroger directement les gens, de les observer, de les écouter, ce qui, évidemment, lui ouvre des horizons.

Elle se fait un point d'honneur d'être proche de la base, comme d'autres aligneraient avec orgueil et vanité, une liste de relations issues des hautes sphères ! Cette attitude, peu habituelle, séduit, bien sûr ! Nous ne sommes plus dans la "com" stérile de Raffarin qui croyait avoir tout résolu en parlant d'une France d'en bas qu'il n'a jamais ni comprise ni aidée !

Elle a enfin intégré le fait que ce qui fonctionne à petite échelle doit être étendu à une plus grande. Elle a l'extrême sagesse de dire "qu'elle ne sait pas tout, qu'elle n'a pas réponse à tout" et par conséquent, cette humilité peu commune aux hommes politiques, est pour elle le meilleur des passeports, pour atteindre les hauts sommets !!!!

Elle n'est pas dans l'idéologie dogmatique, elle est dans le pragmatisme et c'est ce qui laisse le peuple, espérer des lendemains qui chantent !!!

Matthieu a dit…

Que Ségolène Royal soit présentée comme le symbole du renouvellement en politique parce qu'elle a 52 ans (alors que dans la vie professionnelle on est vieux à 40 ans !!!!!!!) et 25 ans et 30 ans de vie politique derrière elle… cela montre bien que notre vie démocramédiatique... ne tourne vraiment pas rond : de quoi être inquiet pour les mois à venir...

Eric le Rouge a dit…

Mais qui donc pourrait croire que les choses vont rester en l’état à gauche, maintenant que la candidature de Ségolène Royal est officielle.

Jean-Luc Mélenchon ne semble pas accepter aussi facilement les petits jeux artificiels au sein du PS qui ont conduit depuis le Congrès du Mans à cette dérive sociale-démocrate orchestrée par la direction du PS.

Le PS n’est pas un ensemble homogène, c’est un ensemble en permanence reconstruit à partir de projets et d’expériences. C’est pourquoi dans cette période extrême du capitalisme libéral, il semble inacceptable pour la gauche du PS de capituler, sur la base notamment d’une approche hypothétique d’une Europe sociale.
Trop long, trop parsemé d’hypothèses et d’embûches.

Alors comme faire barrage à cette la dérive ? d’une seule manière en faisant le choix d’agir sur l’extérieur, sur la gauche de la gauche qui cherche à se rassembler. L’intelligence de cette gauche là serait de se montrer attractive et de quitter le PS.

Jean a dit…

Je croirai à la promesse du changement quand je ne verrai plus les voitures des ministres foncer dans Paris avec leur gyrophare et leurs vitres fumées. Ou alors quand je ne verrai plus leur voitures garées en double file devant les palaces parisiens.

Odette a dit…

Jack sera peut-être 1er ministre et ça va être la fête tous les jours à Matignon.

Et l’opportuniste Arnaud Ministre de la Justice?

La racaille peut dormir tranquille. Qu'est-ce qu'on va rire…

Sébastien a dit…

Ne pensez vous pas à revoir votre objectivité dans vos articles? Vous me décevez énormément.

Votre critique de Ségolène Royal prend une ampleur incroyable...

Céline a dit…

Ségolène Royal n'a gagné que l'investiture du PS, pas la présidentielle.

A écouter les socialistes, on a l'impression qu'elle est déjà présidente de la République. Quant à l'éventualité qu'elle soit élue il faudra bien réfléchir avant.

Une femme au pouvoir c'est très bien, je suis pour et je vote des deux mains.

Mais Ségolène Royal, je ne pense pas qu'elle ait les épaules taillées pour ce poste. Au niveau international surtout puisque son rôle consistera en gros de gérer les affaires extérieures.

Que va t-il se passer avec l'Iran? comment va t elle réagir si les Etats-Unis déclenchaient un conflit avec l'Iran?

Et puis honnêtement on aura avec elle un gouvernement avec les mêmes qu'il y a 20 ans. Lang aura un ministère, DSK aussi et Fabius n'en parlons pas… ça changera quoi d'avoir Ségolène? pas grand chose…

Christophe a dit…

Il faut laisser cet évènement à son niveau: le parti socialiste a désigné sa candidate et pas une présidente de la République.

A écouter les médias on pourrait croire le contraire. Ce n'est plus de l'info mais de la propagande.

Victor a dit…

Au-delà de l’amusement général lié à la déroute des éléphants, il nous faut bien observer ce qui se passe : c’est le premier acte d’un futur 2eme tour avec Le Pen présent.

A gauche, il est évident que l’ultra-gauche (de Mélenchon aux Altermondialistes) ne voudra pas de Ségolène. Il est probable que, comme pour la guerre en Irak et le Non au référendum, ils se regroupent autour - par exemple - de Bové. Qui peut exclure que Bové soit devant Ségolène ?

A droite, Bayrou va faire des siennes, Sarkozy va hériter d’une bavure policière plus ou moins provoquée, Chirac va sortir MAM, ou n’importe qui, du bois et Le Pen va ramasser la mise.

Ce n’est qu’un scénario, mais qui peut l’exclure ?

Agnès a dit…

J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt la campagne interne du PS et je croisais les doigts pour qu’il ne bascule pas complètement à droite.

C’est pourquoi je me résignais à croire en Laurent Fabius. Avant lui, j’avais de l’espoir en Montebourg...

Maintenant tout est clair : le PS va de plus en plus devenir un parti Démocrate à l’américaine, la première pierre est posée...

Alors la gauche anti-libérale doit s’unir, l’espace est là.

Elodie a dit…

Les militants du PS ne sont pas majeurs et se laissent facilement " matraquer " et influencer par les médias...

Maurice a dit…

Le PS s’est suicidé avec ce choix, tant mieux ! c’est un grand jour, l’optimisme est de rigueur !