20 décembre 2012

Projet de loi bancaire : une nouvelle réforme à l’eau tiède…

Secteur d'activité économiqueLe gouvernement a adopté en conseil des ministres du 19 décembre un projet de loi bancaire supposé « remédier à certaines carences du dispositif de régulation du secteur financier », identifiées lors de la crise financière qui a débuté en 2007-2008. 

Mais contrairement à l’objectif annoncé, cette loi n’apportera « qu’un ajustement à la marge » comme l’écrit d’ailleurs l’ONG Finance Watch dont le but est de remettre la finance au service de la société. Les auteurs du projet de loi ont retenu en effet des dispositions qui vont permettre aux banques de continuer à fonctionner comme avant la crise…



Les patrons de banques se sont agités avec succès : le gouvernement a renoncé à réformer en profondeur le secteur en procédant à une séparation nette des banques de dépôts et des banques d’investissement. Il propose juste de placer certaines activités risquées dans des filiales séparées. Et les banques assurent qu’elles n’ont presque pas d’activités risquées...

Pourtant, dans son discours du Bourget du 22 janvier 2012, le candidat François Hollande déclarait vouloir « maîtriser la finance par le vote d’une loi sur les banques qui les obligera à séparer leurs activités de crédit de leurs opérations spéculatives ». 

Or, le projet de loi dans son titre premier (articles 1 et 2) propose de séparer les « activités bancaires utiles » des « activités bancaires spéculatives ». Il n’est plus question d’ « activités de crédit ». 

Ce changement de vocabulaire n’est pas innocent : il permet aux auteurs du projet de loi de déclarer utile l’activité de « fourniture de services d’investissement à la clientèle », ainsi que celle de « tenue de marché sur instruments financiers ». Ces activités, qui relèvent de la banque d’investissement et dont une grande partie est pourtant spéculative, pourront rester au sein de la banque de détail car elles sont jugées « utiles » …

Cette nouvelle loi bancaire est donc non seulement inefficace mais dangereuse. Inefficace parce que la notion d’ « activités bancaires utiles » pourra donner lieu à de multiples interprétations et contestations de la part des banquiers. Dangereuse parce qu’elle préserve le statu quo dans les banques et maintient des relations malsaines entre la banque de détail, tournée vers le financement d’activités réelles, et la banque d’investissement, tournée vers les profits purement financiers et la spéculation.

Même la soi-disant interdiction d’opérations spéculatives, comme le trading à haute fréquence à partir d’ordinateurs et la spéculation sur les produits dérivés de matières premières agricoles, ne dépasse pas l’effet d’annonce. Car l’essentiel de ces opérations sont aujourd’hui en pratique menées au nom de la « tenue de marché », qui est justement décrétée « utile » par le projet de loi. Selon les estimations publiées par les banques elles-mêmes, cette nouvelle loi affectera moins de 5% de leur activité…

Le projet de loi prévoit dans son titre 2 un renforcement des pouvoirs des autorités de contrôle des banques et des marchés financiers. Mais que pèseront ces autorités publiques, composées pour une large part de banquiers ou de financiers, face à des mastodontes bancaires dont le poids financier et politique est considérable ? 

Le bilan cumulé des 3 plus grandes banques françaises est supérieur à 2.5 fois le PIB ! Seule une séparation complète de la banque de détail et de la banque d’investissement permettrait de commencer à réduire la taille des banques. 

Cette séparation a été imposée aux Etats-Unis en 1933 par le Glass-Steagall Act et en France par la loi bancaire de 1944. Ce qui a limité les crises bancaires pendant les décennies qui ont suivi jusqu’à ce que ces lois soient abrogées dans le cadre des politiques néolibérales dont on constate aujourd’hui les résultats dramatiques…



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