26 avril 2014

La plus vieille usine de France va-t-elle fermer ses portes ?

Il faut sauver la plus vieille usine de France
A Docelles dans les Vosges, la plus vieille usine de France, née en 1478 à l’époque de Johannes Gutenberg, est menacée de fermeture définitive. 

Le groupe finlandais UPM-Kymmene, spécialisé dans les produits forestiers et employant 25 000 personnes dans le monde, veut en effet fermer cette usine de production de papiers spéciaux, dans le cadre de sa stratégie internationale…


En décembre 2013, la direction des papeteries de Docelles annonce la fermeture de l’usine, spécialisée notamment dans la fourniture de papiers pour magazines. Un plan social de suppression de 161 emplois est présenté. 

Début janvier 2014, le plan social est validé par les autorités françaises mais localement, des experts affirment que l’entreprise est viable car c’est une unité moderne ayant bénéficié, il y a sept ans, d’un investissement de 26 millions d’euros ! 

84 salariés se portent alors candidats à la reprise du site dans le cadre d'une SCOP. Le projet prévoit la reprise de 116 personnes la première année, 130 la seconde puis 160 la troisième avec, il est vrai, des réductions de salaires de 15 %. Les besoins en fonds de roulement, évalués à 15 millions d’euros, sont couverts par une partie des indemnités perçues par les ex-salariés et de l’enveloppe du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ainsi que des financements coopératifs et bancaires. Ce projet est soutenu par le gouvernement, les collectivités locales, le mouvement coopératif et plusieurs banques. 

Une seule chose manque : la propriété du site que le groupe refuse de céder. Les salariés, s’estimant lésés par cette fermeture brutale, réclament fort légitimement que celui-ci soit cédé pour un euro symbolique. Mais le groupe UPM demande qu’une nouvelle offre soit formulée pour la reprise du site. Les salariés proposent alors  3 millions d’euros, somme non négligeable et qui représente 35 000 euros par sociétaire ! 

Début mars 2014, UPM rejette sèchement l’offre des salariés, indiquant pour la première fois qu’ils en exigent maintenant entre 10 et 12 millions d’euros. Impossible et inacceptable pour les salariés. « Au départ, nous voulions racheter l’usine pour l’euro symbolique, ce que UPM a refusé. Nous sommes montés à 3 millions d’euros, ce qui est énorme. Mais UPM n’a pas tenu ses promesses de vendre ses actifs, ils nous ont menti » déclare Sébastien Saget, délégué syndical CGT dans l’entreprise. 

L'avocat des salariés, Me Ralph Blindauer, estime pour sa part que le groupe finlandais a "multiplié les obstacles pour ne surtout pas vendre l'usine, contrairement à ses promesses initiales". Les responsables d'UPM "s'ingénient à torpiller toutes les solutions mises en place", a-t-il dénoncé, faisant part de "l'intention d'aller porter le fer en Finlande avec les élus locaux".

Le 19 mars 2014, une opération portes ouvertes est organisée à l’appel de l’intersyndicale CGT et CFE-CGC. Il y a là des familles, des enfants qui découvrent les gigantesques cuves, les pulpeurs, les moteurs, les tubes, les chaînes de l’entreprise. " 400 à 500 personnes sont venues lors de nos portes ouvertes, ce qui est plutôt encourageant. L'idée, c'était aussi de faire un point complet avec les salariés, de voir qui est toujours partant pour une éventuelle SCOP si on arrive à convaincre UPM ", a expliqué à l'AFP Sébastien Saget.

Prochain RV à Munich le 12 mai prochain


Le 24 avril 2014, les salariés se réunissent pour affiner leur stratégie et entament des procédures juridiques pour mettre la pression sur UPM. 

40 salariés déposent un dossier aux Prud’hommes pour non-exécution du Plan de sauvegarde de l’emploi. 30 autres seront déposés dans les jours qui viennent pour licenciement sans cause réelle. Les porteurs du projet SCOP déposent aussi une plainte auprès du Tribunal de commerce pour obstruction à la vente. 

Le Ministère du redressement productif reste mobilisé sur le dossier et les représentants des salariés doivent rencontrer le 12 mai prochain le responsable du Groupe finlandais chargé des cessions à UPM Munich. Puis ils prendront contact avec le comité d’entreprise d’Augsburg. « Nous avons également fait partir une demande de médiation auprès du point de contact national de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) »  complète Nicolas Prévot, le représentant de la CFE-CGC.

Doit-on accepter que ce groupe dicte ses conditions et envoie dans la misère 161 salariés ou va-t-on réquisitionner l’usine pour que les emplois et savoir-faire locaux restent ? Au centre de cette question se trouve la pertinence du droit de propriété.

Deux logiques sont désormais face à face. Celle des salariés qui exigent le maintien des emplois et du savoir-faire local, exigence qui conditionne souvent la vie d’une localité. Celle des actionnaires qui, au nom du sacro-saint droit de propriété, estiment avoir le droit de fermer une usine en bloquant toute perspective de maintien de la production, quitte à laisser celle-ci dépérir. 

La loi Hamon permettant la reprise des entreprises par les salariés n’est toujours pas votée ! Quelle application sera faite de la loi dite « Florange » qui impose aux entreprises fermant des sites rentables de rechercher un repreneur ? Ici, le repreneur était tout trouvé : la SCOP. A ce jour, il n’y en a plus d’autres... 


Pour sauver la papeterie de Docelles, signer la pétition ICI


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