16 décembre 2019

Douze ministres out depuis le début du quinquennat : une incurie politique inquiétante...

Jean-paul Delevoye
Après plusieurs jours de polémique, le haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye a finalement remis sa démission au président de la République, qui l'a acceptée " avec regret ", lundi 16 décembre. 

Fragilisé par des soupçons de conflits d'intérêts après des " oublis " dans sa déclaration d'intérêts, cette nouvelle affaire montre toute l’incurie politique d’Emmanuel Macron qui n’a jamais vérifié quoi que ce soit avant de nommer Jean-Paul Delevoye au gouvernement en 2019 en tant que haut-commissaire aux Retraites...


Dans la déclaration obligatoire faite à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), dont il s'est acquitté après sa nomination en tant que haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye a omis de déclarer certains des mandats qu'il exerçait. 

C'est d'abord Le Parisien qui révèle, lundi 8 décembre, qu'il occupe la fonction de président du Think-tank Parallaxe de " HEP Education au sein du groupe de formation IGS " depuis 2017. Il perçoit à ce titre une coquette rémunération, non compatible avec son poste au gouvernement, de 5 368 € mensuels, soit un montant annuel de 64 420 € net.

Plus grave : Le Parisien révèle également qu'il entretient des liens étroits avec le monde de l'assurance puisqu'il est l'un des administrateurs de l'Institut de formation de la profession de l'assurance (IFPASS). Un ancien dirigeant de cet établissement indique d'ailleurs au quotidien que " les liens avec Jean-Paul Delevoye sont précieux, notamment parce que l'ensemble du secteur est très intéressé par la réforme ". 

Le Monde révèle enfin quelques jours plus tard que sa deuxième version de la déclaration d'intérêts compte finalement non pas trois mandats, comme initialement indiqué, mais bien treize. Dix mandats ont donc été " oubliés " de la déclaration d'intérêts initiale ! 

Plus grave encore, toujours selon le journal Le Mondele secrétariat général du gouvernement était au courant de l’activité de Jean-Paul Delevoye au sein du Think-tank Parallaxe, alors que la Constitution interdit le cumul de mandats rémunérés privés et publics !


Finalement, la démission de Jean-Paul Delevoye porte à douze le nombre de ministres démissionnaires ou démissionnés depuis le début du quinquennat d'Emmanuel Macron le 14 mai 2017 :
  • Richard Ferrand, ministre de la Cohésion des territoires, démissionne le 19/06/17. Il est ministre de la Cohésion des territoires dans le premier gouvernement Édouard Philippe, de mai à juin 2017. Alors que son nom est mentionné dans plusieurs affaires, il n'est pas reconduit au gouvernement et devient président du groupe LREM à l'Assemblée nationale. L'année suivante, il succède à François de Rugy à la présidence de l'Assemblée nationale. Il est mis en examen en 2019 pour prise illégale d'intérêts dans l'affaire des Mutuelles de Bretagne.
  • François Bayrou, ministre de la Justice, renonce le 19/06/17. Ne se présentant pas à l'élection présidentielle de 2017, il soutient la candidature d'Emmanuel Macron, qui l'emporte et le nomme ministre d'État, garde des Sceaux, ministre de la Justice au sein du gouvernement Édouard Philippe. Un mois plus tard, cité dans l'affaire des assistants parlementaires du MoDem au Parlement européen, il renonce à intégrer le second gouvernement Édouard Philippe. En 2019, il est mis en examen pour « complicité de détournement de fonds publics » dans cette affaire.
  • Sylvie Goulard, ministre des Armées, démissionne le 20/06/17. Cadre du MoDem avant de rejoindre LREM, elle devient, en mai 2017, ministre des Armées dans le premier gouvernement Édouard Philippe. En juin 2017, elle n'est pas reconduite dans ses fonctions dans le second gouvernement en raison de l’affaire des assistants parlementaires du MoDem.
  • Marielle de Sarnez, ministre chargé des Affaires européennes, renonce le 21/06/17. Éphémère ministre chargée des Affaires européennes en 2017, elle est élue députée dans la onzième circonscription de Paris puis devient présidente de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale. En 2019, elle est mise en examen dans l'affaire des assistants parlementaires du Mouvement démocrate au Parlement européen. 
  • Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire, démissionne le 28/08/18. Après avoir refusé le ministère de l'Écologie successivement proposé par les présidents Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande, il accepte en 2017 d'être nommé ministre d'État, ministre de la Transition écologique et solidaire, au sein des gouvernements Edourad Philippe I et II. En désaccord avec plusieurs mesures prises par l’exécutif, il quitte le gouvernement quinze mois plus tard.
  • Laura Flessel, ministre des Sports, démissionne le 04/09/18. Le 17 mai 2017, elle est nommée ministre des Sports dans le gouvernement Édouard Philippe. Elle conserve ce poste dans le deuxième gouvernement annoncé le 21 juin 2017 après les élections législatives. Elle quitte ses fonctions gouvernementales le 4 septembre 2018.
  • Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur, démissionne le 02/10/18. Le 1er octobre 2018, il présente sa démission du gouvernement à Emmanuel Macron, qui la refuse. Il réaffirme pourtant son intention de démissionner de ses fonctions le même jour, puis de nouveau le lendemain, ce qui contraint le gouvernement à entériner son départ. Ses fonctions sont assurées par intérim par le Premier ministre, Édouard Philippe, avec qui il entretenait des relations tendues depuis plusieurs mois.
  • Nathalie Loiseau, ministre des Affaires européennes quitte le gouvernement le 27/03/19. De 2017 à 2019, elle est ministre chargée des Affaires européennes dans le second gouvernement Édouard Philippe. Elle quitte le Gouvernement pour conduire la liste de la majorité aux élections européennes de 2019. Après avoir été longtemps donnée favorite dans les sondages, celle-ci arrive en deuxième position de ce scrutin (22,4 %), derrière celle du Rassemblement national (23,3 %).
  • Benjamin Griveaux, secrétaire d'Etat auprès du 1er ministre, quitte le gouvernement le 27/03/19. Il est élu député en 2017 dans la cinquième circonscription de Paris et devient secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances au sein du gouvernement Édouard Philippe II. De 2017 à 2019, il est rattaché au Premier ministre et exerce la fonction de porte-parole du Gouvernement. Il démissionne du gouvernement pour se présenter aux élections municipales de 2020 à Paris, pour lesquelles il obtient l'investiture de La République en marche.
  • Mounir Mahjoubi, secrétaire d'Etat chargé du Numérique, quitte le gouvernement le 27/03/19. Lors des élections législatives de 2017, il est élu député dans la seizième circonscription de Paris. Le 16 octobre 2018, il est nommé secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances et du ministre de l'Action et des Comptes publics, chargé du numérique. Il démissionne du gouvernement le 27 mars 2019 afin de se préparer aux élections municipales à Paris. Il reprend son siège à l'Assemblée nationale le mois suivant.
  • François de Rugy, ministre d’Etat, ministre de la Transition écologique et solidaire et numéro 2 du gouvernement, démissionne le 16/07/19. Réélu député en juin 2017, il rejoint le groupe LREM avant d'être élu président de l'Assemblée nationale. En septembre 2018, il est nommé ministre d'État, ministre de la Transition écologique et solidaire dans le gouvernement Edouard Philippe II, succédant à Nicolas Hulot. Il démissionne en juillet 2019 après des révélations de Mediapart sur son utilisation personnelle de fonds publics à l'Assemblée nationale.
Au total, douze ministres démissionnaires ou démissionnées - et même seize si l'on y ajoute les personnalités non renouvelées lors des remaniements ministériels des gouvernements Edouard Philippe I et II - ce qui donne un départ en moyenne tous les deux mois depuis le début du quinquennat ! 


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