01 janvier 2022

Fin du quinquennat d'Emmanuel Macron mais où sont les réformes ? (1)

Les réformes d'Emmanuel Macron
De vraies réformes sont indispensables à la France  en vue de réconcilier les citoyens avec la République et la justice sociale mais elles n’auront pas vu le jour sous ce quinquennat qui s'achève.

A défaut de véritables réformes institutionnelle, sociale, fiscale, hospitalière, etc., Emmanuel Macron s'est contenté de faire quelques réformettes comme celle de l'Assurance chômage visant d'abord à réaliser des économies budgétaires...

Les vraies réformes dont la France a besoin ont toujours été renvoyées aux calendes grecques depuis plusieurs dizaines d'années par tous les gouvernements successifs et celui d’Emmanuel Macron n’échappe pas à la règle.

Un mot de Pierre Mendes France en son temps reste toujours d’une profonde actualité : " si les réformes nécessaires au pays ne sont pas engagées dans les six premiers mois qui suivent l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement, elles ne se font jamais ". 

Changer la constitution du 4 octobre 1958

La constitution du 4 octobre 1958 et les institutions de la 5ème République, à caractère monarchique, accordent bien trop de pouvoir au président de la République. La France est ainsi un des rares pays dans le monde où un seul homme peut décider à peu près de tout, et même d'une éventuelle entrée en guerre de la France à l'égard d'un pays tiers.

On ne peut accepter également l’importance que prend l’exécutif au détriment du Parlement. Il est ainsi symptomatique que l’article 34 de la Constitution limite les domaines d’intervention du législateur et que l’article 38 autorise le gouvernement à empiéter sur le domaine législatif par voie d’ordonnance. De même, on ne peut que condamner l’idée - présente dans l’article 49-3 - selon laquelle le gouvernement, en engageant sa responsabilité sur un projet de loi, peut le faire adopter sans même que l’Assemblée nationale ait eu à se prononcer sur le texte.

Fusionner le Sénat avec le Conseil économique, social et environnemental (CESE) au sein d'une nouvelle assemblée restreinte

« Le Sénat a un privilège exorbitant et imparable, celui de tout bloquer » indiquait en son temps le Général De Gaulle qui a tenté d’en faire une sorte de super Conseil économique et social composé de représentants de tous les intérêts de la société. La nécessité d’une seconde chambre consultative représentant les collectivités territoriales et les organisations économiques, familiales, intellectuelles avait été énoncée dans son discours de Bayeux le 16 juin 1946. L’échec du référendum du 27 avril 1969 où le Non l’a emporté par 52,41% des suffrages, a vu la fin de ce projet.

Mais aujourd'hui, avec un peu d’ambition et de courage, l’on pourrait fusionner le Sénat (348 membres) et le CESE (233 membres) au sein d’une nouvelle chambre exerçant une fonction exclusivement consultative, ne disposant d’aucun pouvoir de blocage et limitée par exemple à 300 membres : 150 membres, ex sénateurs et 150 autres membres représentant les activités économiques, sociales et culturelles, désignés par des organismes représentatifs (salariés, agriculteurs, entreprises, familles, professions libérales, enseignement supérieur et la recherche, activités sociales et culturelles).

Instaurer la proportionnelle  

La composition de l'Assemblée nationale et du Sénat ne reflète pas, loin s'en faut, les diverses sensibilités politiques du pays. En l'absence d'élection à la proportionnelle (comme cela se fait dans une écrasante majorité de pays européens), les députés sont élus au scrutin majoritaire dans le cadre de circonscriptions électorales découpées le plus souvent de façon fantaisiste. Quant aux sénateurs, ils sont désignés de façon tout à fait anti-démocratique par les seuls grands électeurs (150 000 élus locaux seulement).

Emmanuel Macron a bien promis une timide dose de proportionnelle de 15% pour l'élection des députés mais même cette réformette a été abandonnée. La raison est simple : les conseillers du président de la République, en effectuant des projections calquées sur les résultats des législatives de 2017, ont réalisé qu'une dose de proportionnelle supérieure à 15%  appliquée à la nouvelle Assemblée fragiliserait les chances du chef de l'État d'obtenir une majorité absolue en 2022…

Instituer des référendums d’initiative citoyenne (RIC) 

Cette revendication est la revendication principale du mouvement des Gilets jaunes depuis l'automne 2018. Le processus est un dispositif de démocratie directe qui permet à des citoyens réunissant un certain nombre de signatures fixées par la loi de saisir la population par référendum sans que soit nécessaire l'accord du Parlement ou du président de la République. Ce type de référendum est utilisé dans une quarantaine de pays dont l'Italie, la Suisse, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis ou l'Allemagne. 

Une possibilité de référendum d'initiative partagé (RIP) existe bien dans l'arsenal législatif actuel mais les conditions de mise en œuvre sont tellement nombreuses et difficiles à atteindre qu'il n'a jamais été possible de l'utiliser. Il faut en effet un cinquième des parlementaires et 10% du corps électoral, soit 4,5 millions de citoyens !

Réduire le colossal millefeuille administratif

Le millefeuille administratif français comporte actuellement 6 niveaux de pouvoir : état, régions, métropoles, départements, communautés de communes, communes et même 7 niveaux si l'on y ajoute l'échelon européen I Les départements notamment qui datent de 1790 sont complètement inutiles et dispendieux pour le plus grand malheur des contribuables. 

Dans ces conditions, la région devrait gérer depuis longtemps l'ensemble des conseils départementaux (anciennement conseils généraux) qui pourraient être remplacés facilement par de simples délégations départementales de la région. Le périmètre des nouvelles régions, découpées de façon fantaisiste et électoraliste par François Hollande,   devrait être également revu avec l'aide d'historiens, géographes et  économistes.

Rétablir l’échelle mobile des salaires pour garantir le pouvoir d'achat des salariés et retraités

Comme le rappelle régulièrement le centre de recherche et des coûts (CERC), un fort sentiment de régression du pouvoir d’achat prédomine depuis de nombreuses années dans la population française car la légère hausse du salaire net moyen est largement inférieure à la perte nette due à l’inflation. 

Une réintroduction de l’échelle mobile des salaires, datant de juillet 1952 sous la présidence de Vincent Auriol (SFIO), protégerait efficacement le pouvoir d’achat des salariés et retraités. Ce système existe dans plusieurs pays d’Europe comme la Belgique et le Luxembourg. . 

De plus, l'échelle mobile des salaires favorise une solidarité entre les travailleurs des secteurs forts et ceux des secteurs faibles ainsi qu’entre les travailleurs actifs et inactifs. Elle est un facteur de stabilité sociale : les négociations salariales peuvent alors se concentrer sur l’augmentation réelle des salaires et des retraites, puisque l’indexation automatique garantit uniquement la compensation de la baisse du pouvoir d’achat. C’est également un facteur de stabilité économique car le maintien du pouvoir d’achat favorise aussi la consommation et donc la croissance économique.

Mettre fin à l’escroquerie de la dette publique

Depuis la loi Pompidou-Giscard du 3 janvier 1973, dite « loi Rothschild » du nom de la banque dont était issu l’ancien président de la République Georges Pompidou, l’État est obligé de se financer par des emprunts, contre intérêts, auprès de banques privées, au lieu de continuer à emprunter sans intérêt à la Banque de France.

Dans le documentaire franco-allemand d'Arte, « La dette, une spirale infernale ? », le pouvoir des banques de créer de l'argent à partir de rien, contre une promesse de remboursement y est critiqué par le regretté Bernard Maris qui expliquait notamment : « L'argent, qui était devenu un bien public - c'est-à-dire que l'État gérait la création monétaire - est redevenu un bien privé, créé par les banques, de grandes puissances autonomes, dans les années 1970, et après ça n'a fait que s'amplifier ». 

Aujourd’hui, Emmanuel Macron, issu lui aussi de la banque Rothschild, n'évoque jamais le contenu de cette loi aberrante, préférant faire des coupes sombres dans les budgets sociaux, augmenter de 25% la CSG pour les retraités, baisser de 5 € le montant des APL, désindexer le montant des pensions de l'inflation, etc. pour réduire le déficit de l’Etat.

Réformer la Sécurité sociale

Changer son mode de financement

Le système de financement repose aujourd’hui sur ce qu’il est convenu d’appeler des cotisations (maladie, vieillesse, allocations familiales, accidents du travail, etc.) ou des contributions (CSG, CRDS, etc.), tantôt déductibles du revenu fiscal, tantôt non déductibles, versées par les salariés ou les employeurs et dont l’assiette est basée essentiellement sur les salaires.

Mais les différentes prestations maladie, familiales ou vieillesse étant accessibles à tous les citoyens, le principe de solidarité nationale exigerait que soit mis à contribution l’ensemble des revenus des personnes physiques, tels que déclarés à l'administration fiscale, d’autant plus que la part des salaires dans la richesse produite chaque année a baissé de 10 points en 30 ans. Un tel changement serait à la fois plus juste et plus rémunérateur car un point de prélèvement assis sur le revenu fiscal rapporte sensiblement plus que le même taux appliqué sur le seul salaire. 

Déjà adopté partiellement ou en totalité par plusieurs pays, tous les citoyens sans exception seraient assujettis à cette nouvelle contribution, même de façon symbolique pour les revenus les plus modestes ou non  imposables.

Ceci est particulièrement vrai pour la réforme du système de retraites, une réforme abandonnée par Emmanuel Macron au cours du quinquennat et contrairement à ce qu’il a prétendu dans son récent discours de 2 heures sur TF1 et LCI, ce n’est  pas la crise de la Covid-19 qui l’a en empêché mais bien la complexité d’un système de retraite par points et le  manque de sérieux dans sa préparation. Il y a d'autres pistes pour un financement pérenne et plus juste pour éviter l’allongement de la durée de cotisation, l’augmentation des cotisations ou la non-indexation du montant des pensions sur le taux annuel d'inflation.

Sauver l’hôpital public

Dans l’histoire de la France, l’hôpital public est passé d'une institution d'assistance et de charité à un établissement dispensant des actes techniques au malade. 

Aujourd'hui, quiconque écoute les personnels de santé sait que, même en temps normal, ils sont débordés et impuissants tant l'hôpital public est malade, sinon mourant. Toutes les mesures gouvernementales ont d’abord été dictées par le manque de lits en hospitalisation et en réanimation. 5700 lits ont été supprimés en 2020 et au total 17 600 lits depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron en 2017 !

La dernière loi Buzyn « d’Organisation et de transformation du système de santé » a  porté un nouveau coup à l’hôpital. Si la suppression du numerus clausus est plutôt positive elle est cependant relative puisque qu’il s'agit en réalité que d'un « assouplissement » du numerus clausus, puisque, tous les ans, les ARS et les doyens des Universités de médecine se réuniront pour déterminer les effectifs souhaitables en deuxième et troisième années de médecine.  

Quant au Ségur de la Santé, il est un pansement sur une jambe de bois. Ce qu’il faut en réalité, ce sont 300 euros mensuels nets de plus pour tous les personnels, l’attribution d'effectifs suffisants à tous les services, la réouverture des lits fermés en aval, le rétablissement des CHSCT avec un pouvoir suspensif sur toute mesure engageant l'avenir des établissements, la suppression de la tarification à l’activité (T2A), le retour à un budget négocié, la démocratisation des Conseils d’administration rétablis.

Rétablir le versement des allocations familiales dès le premier enfant

Depuis que le décret-loi du 29 juillet 1939 avait supprimé l’allocation au premier enfant au profit d’une prime à la première naissance, la France est restée avec cette vieille idée, non  vérifiée sociologiquement à ce jour, qui consiste à favoriser les naissances en ne donnant pas d’allocations aux familles dès le premier enfant. 

Tout se passe comme si les frais occasionnés par un premier enfant étaient négligeables alors que cela coûte aussi cher, sinon plus proportionnellement, que de deux enfants et plus ! 

Autre incohérence, les allocations sont versées dès le premier enfant dans les DOM, comme s’il y avait un principe à géométrie variable et deux catégories de Français ! 


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