Philippe
Séguin est décédé le 7 janvier 2010, à l'âge de 66 ans. Si toute la classe
politique lui a rendu un hommage unanime, elle n’avait pourtant pas grand-chose
de commun avec celui qui ne cessa jamais de placer la France et la République
au-dessus des clans et des combines.
C’était certes un homme politique de droite mais un vrai républicain qui défendait d'abord ses idées au détriment quelquefois de sa carrière personnelle...
Le texte prévoyait les fameux critères de convergence vers l'euro (maîtrise de l'inflation, de la dette publique, des déficits, stabilité des taux de change), le tout sous l'autorité de la banque centrale européenne dont l'indépendance était inscrite dans le traité.
C'est précisément les critères de convergence et le rôle de la BCE qui avaient convaincu Philippe Séguin d'opter pour le "Non" et de dire du haut de la tribune de l'Assemblée nationale, le 5 mai 1992 : "1992 est littéralement l'anti-1789 !", en dénonçant "l'engrenage économique et politique", "un fédéralisme au rabais fondamentalement anti-démocratique, faussement libéral et résolument technocratique".
Démontant un par un les arguments du camp adverse, il accusait : "L'Europe qu'on nous propose n'est ni libre, ni juste, ni efficace. Elle enterre la conception de la souveraineté nationale et les grands principes issus de la Révolution" et soulevait en application de l'article 91, alinéa 4, une exception d'irrecevabilité.
Ce discours très instructif reste encore aujourd’hui d’une terrible actualité sur l’Europe et ses critiques contre le traité de Maastricht ne sont pas sans rappeler les critiques que faisait Pierre Mendès France le 18 janvier 1957, à cette même assemblée nationale, contre le Traité de Rome…
C’était certes un homme politique de droite mais un vrai républicain qui défendait d'abord ses idées au détriment quelquefois de sa carrière personnelle...
Gaulliste social, il avait voté notamment contre le traité de Maastricht lors
du référendum du 20 septembre 1992 alors que le PS, les principaux dirigeants
du RPR, Valéry Giscard d'Estaing et Raymond Barre appelaient à voter Oui. Un
Oui qui l’emporta finalement de peu avec 51,05 % des suffrages exprimés mais
sans atteindre toutefois la majorité des votants, compte tenu des votes blancs
ou nuls.
Le texte prévoyait les fameux critères de convergence vers l'euro (maîtrise de l'inflation, de la dette publique, des déficits, stabilité des taux de change), le tout sous l'autorité de la banque centrale européenne dont l'indépendance était inscrite dans le traité.
C'est précisément les critères de convergence et le rôle de la BCE qui avaient convaincu Philippe Séguin d'opter pour le "Non" et de dire du haut de la tribune de l'Assemblée nationale, le 5 mai 1992 : "1992 est littéralement l'anti-1789 !", en dénonçant "l'engrenage économique et politique", "un fédéralisme au rabais fondamentalement anti-démocratique, faussement libéral et résolument technocratique".
Démontant un par un les arguments du camp adverse, il accusait : "L'Europe qu'on nous propose n'est ni libre, ni juste, ni efficace. Elle enterre la conception de la souveraineté nationale et les grands principes issus de la Révolution" et soulevait en application de l'article 91, alinéa 4, une exception d'irrecevabilité.
Ce discours très instructif reste encore aujourd’hui d’une terrible actualité sur l’Europe et ses critiques contre le traité de Maastricht ne sont pas sans rappeler les critiques que faisait Pierre Mendès France le 18 janvier 1957, à cette même assemblée nationale, contre le Traité de Rome…
Extraits
du discours prononcé par Philippe Séguin le 5 mai 1992
(Exception
d'irrecevabilité en application de l'article 91, alinéa 4, du Règlement)
Monsieur
le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues,
Je
voudrais croire que nous sommes tous d'accord au moins sur un point :
l'exceptionnelle importance, l'importance fondamentale du choix auquel nous
sommes confrontés, et, ce disant, je n'ai pas l'impression de me payer de mots
!
C'est en tout cas avec gravité que je viens inviter cette assemblée à opposer l'exception d'irrecevabilité au projet de loi constitutionnelle que le Gouvernement nous présente comme préalable à la ratification des accords de Maastricht négociés le 10 décembre 1991 par les chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres des communautés européennes et signés le 7 février dernier.
Mon irrecevabilité se fonde sur le fait que le projet de loi viole, de façon flagrante, le principe en vertu duquel la souveraineté nationale est inaliénable et imprescriptible, ainsi que le principe de la séparation des pouvoirs, en dehors duquel une société doit être considérée comme dépourvue de Constitution.
Il existe en effet, au-dessus même de la charte constitutionnelle, des droits naturels, inaliénables et sacrés, à savoir pour nous les droits de l'homme et du citoyen tels qu'Ils ont été définis par la Déclaration de 1789. Et quand l'article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 rappelle que « La souveraineté nationale appartient au peuple », il ne fait que reconnaître le pacte originel qui est, depuis plus de deux cents ans, le fondement de notre Etat de droit. Nulle assemblée ne saurait donc accepter de violer délibérément ce pacte fondamental.
La question de la séparation des pouvoirs se pose dans les mêmes termes. Aucune assemblée n'a compétence pour se dessaisir de son pouvoir législatif par une loi d'habilitation générale, dépourvue de toute condition précise quant à sa durée et à sa finalité. A fortiori, aucune assemblée ne peut déléguer un pouvoir qu'elle n'exerce qu'au nom du peuple. Or, le projet de loi qui nous est soumis comporte bien une habilitation d'une généralité telle qu'elle peut être assimilée à un blanc-seing.
Et nous voilà confrontés à une situation tout à fait extraordinaire dans notre histoire constitutionnelle puisque, pour la première fois, on demande au Parlement de constitutionnaliser par avance des textes qui n'existent pas encore et qui, pour la plupart, ne seront même pas soumis à ratification dès lors qu'il s'agira de normes communautaires directement applicables. On demande donc au Parlement, qui n'en a pas le droit, rien de moins que d'abandonner sa compétence législative aux organes communautaires chaque fois que ceux-ci le jugeront nécessaire pour l'application du traité.
Ayant fait référence à 'a Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, violée deux fois par le projet de loi, je pourrais considérer ma tâche comme accomplie. Néanmoins, tout en conservant présente à l'esprit cette observation préalable qui sous-entend tout mon propos, j'entends traiter le sujet en ne négligeant aucune de ses composantes. Ce n'est pas mon fait si le débat constitutionnel et le débat sur l'avenir européen sont étroitement imbriqués, le projet de révision venant avant le projet de ratification. Alors, autant en convenir déjà entre nous - et vous l'avez déjà fait implicitement cet après-midi, messieurs les ministres : il n'y a en vérité qu'un seul débat qui ne peut être découpé en tranches successives. Et comme ce débat sera clos dès lors que nous nous serons prononcés sur le projet de révision constitutionnelle, autant l'entamer tout de suite et dans sa totalité.
De même, et sans vouloir verser dans un manichéisme que je réprouve, il nous faut également convenir qu'il n'y a rien à amender. Plutôt que de procéder à un toilettage minutieux de nombreuses dispositions constitutionnelles, vous avez préféré pratiquer une sorte de « lessivage à grande eau ». A ce qui aurait pu passer pour une naïveté coupable, vous avez ainsi préféré le risque de l'astuce. Il est vrai que sinon vous auriez été contraints de modifier neuf articles au moins du texte constitutionnel, dont certains sont particulièrement sensibles et symboliques. Vous auriez été contraints, de surcroît et en toute logique, de déconstitutionnaliser la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Vous avez reculé, et l'on vous comprend, au point d'ailleurs d'esquiver vos responsabilités dans la dénomination même du projet qui nous est soumis. Il ne s'agit même pas, si je m'en tiens à son libellé, d'un projet de loi de révision, mais d'un projet de loi constitutionnelle ajoutant à la Constitution un titre supplémentaire,
Je ne peux évidemment applaudir à cette démarche, mais je reconnais que cela ne change rien au fond. Je vous concéderai même que ce blanc-seing que vous sollicitez est en cohérence avec les perspectives que vous ouvrez. Je vous rejoins donc quand vous affirmez que Maastricht n'est pas renégociable et on ne changera pas le traité par le biais d'une manipulation constitutionnelle.
Toutes les garanties, précisions, corrections, conditions dont on nous parle relèvent, à mes yeux, de l'illusion. La révision, la ratification, c'est à prendre ou à laisser.
C'est assez dire qu'il ne m'est pas possible de séparer l'appréciation constitutionnelle de l'analyse critique des accords. Dès lors que l'on nous demande de changer la Constitution dans le seul but de ratifier le traité de Maastricht, nous ne pouvons-nous prononcer sur la réforme constitutionnelle sans mesurer à quoi nous engage ce traité.
Ce faisant, je me plie- je n'ai guère le choix - à la procédure, à la méthode, imposée par le Président de la République. L'inconstitutionnalité que je soulève est, du reste, inséparable du regret que suscite en moi le non-recours à l'article 11 de la Constitution qui impliquait le référendum direct.
Allez dire à d'autres, Messieurs les ministres, pour justifier ces habiletés tactiques, que la procédure de l'article 89 rend sa dignité au Parlement! Convenez que l'argument est plutôt singulier au moment où l'on nous demande de diminuer encore son pouvoir réel !
Je le proclame donc d'emblée : dès lors que l'entrée de la France dans l'Europe de Maastricht constitue bien l'acte historique qu'a évoqué le Président de la République, il serait normal, nécessaire, légitime, indispensable que la parole soit donnée au peuple...) Non point que je conteste la légitimité de cette assemblée. Je ne me suis pas associé au chœur de ceux qui, il y a quelques semaines, ne trouvaient pas de mots assez durs pour l'abaisser, pour réclamer sa dissolution, voire proposer son auto-dissolution.
Je constate d'ailleurs la contradiction dans laquelle s'enferment aujourd'hui nombre d'entre eux en se refusant à l'idée d'un référendum.
Ce que je veux seulement dire c'est que le recours à la voie parlementaire est contraire à l'esprit de notre pacte social car ce que le peuple fait, seul le peuple peut le défaire.
En outre, c'est une faute politique lourde que de refuser de donner à un engagement aussi grave la sacralisation dont il a besoin. Et ne changerait rien' l'affaire la manœuvre qui consisterait, ultérieurement, à ne faire ratifier par le peuple que ce que le Parlement aurait déjà décidé,
Non, foin d'arguties ! Il me faut dire avec beaucoup d'autres, au nom de beaucoup d'autres, qu'il est bien temps de saisir notre peuple de la question européenne. Car voilà maintenant trente-cinq ans que le traité de Rome a été signé et que d'Acte unique en règlements, de règlement en directives, de directives en jurisprudence, la construction européenne se fait sans les peuples, qu'elle se fait en catimini, dans le secret des cabinets, dans la pénombre des commissions, dans le clair-obscur des cours de Justice.
Voilà trente-cinq ans que toute une oligarchie d'experts, de juges, de fonctionnaires, de gouvernants prend, au nom des peuples, sans en avoir reçu mandat des décisions dont une formidable conspiration du silence dissimule les enjeux et minimise lei conséquences. Que l'on m'entende bien : je ne viens ici donner de leçon à personne ; mais que l'on veuille bien, en retour, respecter ma propre démarche ! Je me serais d'ailleurs bien passé d'être là. Il eût mieux valu, à l'évidence, que des voix plus fortes que la mienne engagent le combat.
Elles ne l'ont pas souhaité, je me garderai de les juger. Je me contente de faire et d'assumer un autre choix. Ce n'est pas si facile.
A la décharge des absents, je reconnais bien volontiers que le conformisme ambiant, pour ne pas dire le véritable terrorisme intellectuel qui règne aujourd'hui, disqualifie par avance quiconque n'adhère pas à la nouvelle croyance, et l'expose littéralement à l'invective. Qui veut se démarquer du culte fédéral est aussitôt tenu par les faiseurs d'opinion (...) au mieux pour un contempteur de la modernité, un nostalgique ou un primaire, au pire pour un nationaliste forcené tout prêt à renvoyer l'Europe aux vieux démons qui ont si souvent fait son malheur.
Mais il est des moments où ce qui est en cause est tellement important que tout doit s'effacer. Et je ne parle pas ici au nom d'une France contre l'autre, car dès lors qu'il s'agit de la France, de la République et de la démocratie, il ne peut plus être question de la droite et de la gauche, l'enjeu, au-delà des partis, des clivages les plus naturels, des oppositions les plus légitimes, des querelles les plus anciennes, n'est rien de moins que notre communauté de destin. Et cette communauté de destin est gravement mise en péril par les accords, alors que ceux-ci ne sont ni la condition de la prospérité, ni la condition de la paix, Dans le monde tel qu'il est, l'idéal comme le réalisme commandaient de faire prévaloir une tout autre conception de l'Europe, voilà ce que je voudrais maintenant développer devant vous.
.../...
Photo Philippe Séguin par Wiki Commons
C'est en tout cas avec gravité que je viens inviter cette assemblée à opposer l'exception d'irrecevabilité au projet de loi constitutionnelle que le Gouvernement nous présente comme préalable à la ratification des accords de Maastricht négociés le 10 décembre 1991 par les chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres des communautés européennes et signés le 7 février dernier.
Mon irrecevabilité se fonde sur le fait que le projet de loi viole, de façon flagrante, le principe en vertu duquel la souveraineté nationale est inaliénable et imprescriptible, ainsi que le principe de la séparation des pouvoirs, en dehors duquel une société doit être considérée comme dépourvue de Constitution.
Il existe en effet, au-dessus même de la charte constitutionnelle, des droits naturels, inaliénables et sacrés, à savoir pour nous les droits de l'homme et du citoyen tels qu'Ils ont été définis par la Déclaration de 1789. Et quand l'article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 rappelle que « La souveraineté nationale appartient au peuple », il ne fait que reconnaître le pacte originel qui est, depuis plus de deux cents ans, le fondement de notre Etat de droit. Nulle assemblée ne saurait donc accepter de violer délibérément ce pacte fondamental.
La question de la séparation des pouvoirs se pose dans les mêmes termes. Aucune assemblée n'a compétence pour se dessaisir de son pouvoir législatif par une loi d'habilitation générale, dépourvue de toute condition précise quant à sa durée et à sa finalité. A fortiori, aucune assemblée ne peut déléguer un pouvoir qu'elle n'exerce qu'au nom du peuple. Or, le projet de loi qui nous est soumis comporte bien une habilitation d'une généralité telle qu'elle peut être assimilée à un blanc-seing.
Et nous voilà confrontés à une situation tout à fait extraordinaire dans notre histoire constitutionnelle puisque, pour la première fois, on demande au Parlement de constitutionnaliser par avance des textes qui n'existent pas encore et qui, pour la plupart, ne seront même pas soumis à ratification dès lors qu'il s'agira de normes communautaires directement applicables. On demande donc au Parlement, qui n'en a pas le droit, rien de moins que d'abandonner sa compétence législative aux organes communautaires chaque fois que ceux-ci le jugeront nécessaire pour l'application du traité.
Ayant fait référence à 'a Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, violée deux fois par le projet de loi, je pourrais considérer ma tâche comme accomplie. Néanmoins, tout en conservant présente à l'esprit cette observation préalable qui sous-entend tout mon propos, j'entends traiter le sujet en ne négligeant aucune de ses composantes. Ce n'est pas mon fait si le débat constitutionnel et le débat sur l'avenir européen sont étroitement imbriqués, le projet de révision venant avant le projet de ratification. Alors, autant en convenir déjà entre nous - et vous l'avez déjà fait implicitement cet après-midi, messieurs les ministres : il n'y a en vérité qu'un seul débat qui ne peut être découpé en tranches successives. Et comme ce débat sera clos dès lors que nous nous serons prononcés sur le projet de révision constitutionnelle, autant l'entamer tout de suite et dans sa totalité.
De même, et sans vouloir verser dans un manichéisme que je réprouve, il nous faut également convenir qu'il n'y a rien à amender. Plutôt que de procéder à un toilettage minutieux de nombreuses dispositions constitutionnelles, vous avez préféré pratiquer une sorte de « lessivage à grande eau ». A ce qui aurait pu passer pour une naïveté coupable, vous avez ainsi préféré le risque de l'astuce. Il est vrai que sinon vous auriez été contraints de modifier neuf articles au moins du texte constitutionnel, dont certains sont particulièrement sensibles et symboliques. Vous auriez été contraints, de surcroît et en toute logique, de déconstitutionnaliser la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Vous avez reculé, et l'on vous comprend, au point d'ailleurs d'esquiver vos responsabilités dans la dénomination même du projet qui nous est soumis. Il ne s'agit même pas, si je m'en tiens à son libellé, d'un projet de loi de révision, mais d'un projet de loi constitutionnelle ajoutant à la Constitution un titre supplémentaire,
Je ne peux évidemment applaudir à cette démarche, mais je reconnais que cela ne change rien au fond. Je vous concéderai même que ce blanc-seing que vous sollicitez est en cohérence avec les perspectives que vous ouvrez. Je vous rejoins donc quand vous affirmez que Maastricht n'est pas renégociable et on ne changera pas le traité par le biais d'une manipulation constitutionnelle.
Toutes les garanties, précisions, corrections, conditions dont on nous parle relèvent, à mes yeux, de l'illusion. La révision, la ratification, c'est à prendre ou à laisser.
C'est assez dire qu'il ne m'est pas possible de séparer l'appréciation constitutionnelle de l'analyse critique des accords. Dès lors que l'on nous demande de changer la Constitution dans le seul but de ratifier le traité de Maastricht, nous ne pouvons-nous prononcer sur la réforme constitutionnelle sans mesurer à quoi nous engage ce traité.
Ce faisant, je me plie- je n'ai guère le choix - à la procédure, à la méthode, imposée par le Président de la République. L'inconstitutionnalité que je soulève est, du reste, inséparable du regret que suscite en moi le non-recours à l'article 11 de la Constitution qui impliquait le référendum direct.
Allez dire à d'autres, Messieurs les ministres, pour justifier ces habiletés tactiques, que la procédure de l'article 89 rend sa dignité au Parlement! Convenez que l'argument est plutôt singulier au moment où l'on nous demande de diminuer encore son pouvoir réel !
Je le proclame donc d'emblée : dès lors que l'entrée de la France dans l'Europe de Maastricht constitue bien l'acte historique qu'a évoqué le Président de la République, il serait normal, nécessaire, légitime, indispensable que la parole soit donnée au peuple...) Non point que je conteste la légitimité de cette assemblée. Je ne me suis pas associé au chœur de ceux qui, il y a quelques semaines, ne trouvaient pas de mots assez durs pour l'abaisser, pour réclamer sa dissolution, voire proposer son auto-dissolution.
Je constate d'ailleurs la contradiction dans laquelle s'enferment aujourd'hui nombre d'entre eux en se refusant à l'idée d'un référendum.
Ce que je veux seulement dire c'est que le recours à la voie parlementaire est contraire à l'esprit de notre pacte social car ce que le peuple fait, seul le peuple peut le défaire.
En outre, c'est une faute politique lourde que de refuser de donner à un engagement aussi grave la sacralisation dont il a besoin. Et ne changerait rien' l'affaire la manœuvre qui consisterait, ultérieurement, à ne faire ratifier par le peuple que ce que le Parlement aurait déjà décidé,
Non, foin d'arguties ! Il me faut dire avec beaucoup d'autres, au nom de beaucoup d'autres, qu'il est bien temps de saisir notre peuple de la question européenne. Car voilà maintenant trente-cinq ans que le traité de Rome a été signé et que d'Acte unique en règlements, de règlement en directives, de directives en jurisprudence, la construction européenne se fait sans les peuples, qu'elle se fait en catimini, dans le secret des cabinets, dans la pénombre des commissions, dans le clair-obscur des cours de Justice.
Voilà trente-cinq ans que toute une oligarchie d'experts, de juges, de fonctionnaires, de gouvernants prend, au nom des peuples, sans en avoir reçu mandat des décisions dont une formidable conspiration du silence dissimule les enjeux et minimise lei conséquences. Que l'on m'entende bien : je ne viens ici donner de leçon à personne ; mais que l'on veuille bien, en retour, respecter ma propre démarche ! Je me serais d'ailleurs bien passé d'être là. Il eût mieux valu, à l'évidence, que des voix plus fortes que la mienne engagent le combat.
Elles ne l'ont pas souhaité, je me garderai de les juger. Je me contente de faire et d'assumer un autre choix. Ce n'est pas si facile.
A la décharge des absents, je reconnais bien volontiers que le conformisme ambiant, pour ne pas dire le véritable terrorisme intellectuel qui règne aujourd'hui, disqualifie par avance quiconque n'adhère pas à la nouvelle croyance, et l'expose littéralement à l'invective. Qui veut se démarquer du culte fédéral est aussitôt tenu par les faiseurs d'opinion (...) au mieux pour un contempteur de la modernité, un nostalgique ou un primaire, au pire pour un nationaliste forcené tout prêt à renvoyer l'Europe aux vieux démons qui ont si souvent fait son malheur.
Mais il est des moments où ce qui est en cause est tellement important que tout doit s'effacer. Et je ne parle pas ici au nom d'une France contre l'autre, car dès lors qu'il s'agit de la France, de la République et de la démocratie, il ne peut plus être question de la droite et de la gauche, l'enjeu, au-delà des partis, des clivages les plus naturels, des oppositions les plus légitimes, des querelles les plus anciennes, n'est rien de moins que notre communauté de destin. Et cette communauté de destin est gravement mise en péril par les accords, alors que ceux-ci ne sont ni la condition de la prospérité, ni la condition de la paix, Dans le monde tel qu'il est, l'idéal comme le réalisme commandaient de faire prévaloir une tout autre conception de l'Europe, voilà ce que je voudrais maintenant développer devant vous.
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Photo Philippe Séguin par Wiki Commons
7 commentaires:
Ce personnage était largement au dessus du lot des hommes politiques actuels. En tout premier lieu, par sa stature (sans jeu de mots !), par le respect qu’il imposait, mais surtout par sa perception véritable de ce que doit être la politique, par une clairvoyance hors du commun, par son sens aigu de la justice et des intérêts suprêmes de la République.
Son dernier passage à la Cours des Comptes de la Nation a prouvé son indépendance d’esprit et a permis de démasquer (un peu) la cupidité de ceux qui sont au pouvoir à ce jour.
Dommage pour nous qu’il n’ait pas été à l’Elysée !
Je me souviens l’avoir entendu dans les années 1992 s’opposer à Maastricht et à ce fameux euro.
Quand on voit ce qu’est ce « machin » qu’on nomme l’Europe, quand on voit la déconfiture de la zone euro et particulièrement en France avec une augmentation jamais inégalée de la pauvreté, ou encore l’humiliation qu’elle a subie à Copenhague tout dernièrement, je me félicite d’avoir voté NON.
A l’évidence, nous franchissons une nouvelle étape dans le recul de démocratie que connaît notre pays notamment depuis 2007, parce qu’on peut être persuadé que désormais la Cour des Comptes, puis pourquoi pas le Conseil Constitutionnel à l’avenir, auront à leur tête des hommes, inévitablement et parfaitement formatés par la pensée unique imposée par qui vous savez... à moins que les Français enfin se ressaisissent et le disent clairement !
Bien qu'étant de gauche,j'ai plus de respect pour Philippe Séguin que pour la plupart des dirigeants socialistes qui ont trahi la gauche en avalisant et en accompagnant cette Europe libérale.
Bien sûr, il avait de grandes qualités morales et intellectuelles, mais justement, comment a-t-il pu s'accommoder des travers de Chirac puis de Sarkozy ?
Il aimait à paraître intransigeant sur les principes mais a laissé aller le cours de la politique de droite pour en arriver à ce que nous voyons aujourd'hui, sans réagir d'une manière visible.
Il a tempêté contre Maastricht, puis s'est dressé contre le libéralisme de Balladur mais après, on ne l'a plus guère entendu.
Son devoir de réserve à la Cour des Comptes lui a permis de se retirer de la politique sans passer pour un lâche.
Cela lui a évité le risque de prendre position. Chirac puis Sarkozy s'en sont trouvés soulagés, mais en même temps, lui aussi...
Hé, les gars, pour le remplacer le tsar kozy n'a que l'embarras du choix parmi les hommes intégres et honnêtes qui l'entourent : Balkany, Tibéri, Santoni, Pasqua, Tapie...
Ou aussi parmi les hommes ou femmes sans concessions, intègres, fidèles à leurs idées qui gravitent autour du monarque : kouchner, Besson (le pantalon) Hirsch, Amara, Lang, Charasse, Rocard...
Ou carrément des hommes ou femmes dont l'intelligence les a portés au plus haut sommet : Doc gynéco, Macias, Farrugia, Hanin, Barbelivien, Clavier, Fodel, Marielle Goitchel, Laporte, Boli, Mireille Mathieu, Arthur...
Hourra la France est sauvée !!!
La République française est LAIQUE.
L'émission spéciale de lundi
après-midi sur France 2 transmettant en direct la messe de funérailles de
Philippe Seguin dans la chapelle des Invalides, avec au premier rang le
président de la République et son gouvernement, est un véritable scandale.
Merci à cet homme saint d'avoir, en 86, supprimé l'autorisation
administrative de licenciement ! Il faut bien servir la soupe du MEDEF !
[Réaction de Laurence Parisot : « Philippe Séguin n'a eu de cesse de
prouver son attachement à l'intérêt national. Patriote, homme intègre, de passion, de conviction et de culture, il a profondément marqué la vie
politique de notre pays. Son engagement et sa vision ont marqué les relations sociales. Sa disparition me bouleverse, Philippe était un ami »,
extrait du site Internet du MEDEF, 07/01/2010]
A noter que les socialistes (mais ce n'est pas une référence, j'en conviens...), malgré leur retour au pouvoir n'ont jamais rétabli l’autorisation administrative de licenciement.
La mesure était surtout inefficace, l’administration étant incapable de juger à la place de l’entrepreneur, de sorte que l’autorisation était autrefois accordée quasi systématiquement, ce qui ferait presque regretter le bon temps à certains de ces entrepreneurs…
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