Dans
le cadre de la préparation du budget 2013, l’abaissement du plafond de
l’avantage procuré par le quotient familial a été adopté. Ainsi, pour
l'imposition des revenus 2012, le plafond permettant de moduler les impôts en
fonction du nombre de personnes rattachées au foyer, va être réduit à 2 000 €
par enfant à charge contre 2 336 € antérieurement.
Une
minorité de ménages très aisés feront certes les frais de cette réduction mais
les attaques de l'UMP semblent avoir porté leurs fruits car ce nouveau plafonnement
prôné par François Hollande ressemble plus à un petit bricolage du dimanche
qu’à une vraie réforme…
Début
janvier 2012, les propositions étaient parties tous azimuts dans l'équipe de
François Hollande : le quotient familial, mesure fiscale très injuste,
allait être remis en cause. Ce mécanisme prend bien en compte la taille de la
famille mais en subventionnant davantage les familles riches que les familles
pauvres, la réduction d'impôt étant proportionnelle au revenu dans la limite
d’un plafond.
On
parlait alors de remplacer le quotient familial par un crédit d'impôt. C'était
le virage prôné par les tenants de la « révolution fiscale », parmi
lesquels l'économiste Thomas Piketty, proche du PS. Cette réforme devait
bénéficier aux familles modestes et notamment aux familles non imposables, sans
toucher aux classes moyennes.
De la réforme à la modulation puis au plafonnement
Devant
l’indignation de Nicolas Sarkozy et de l'UMP qui parlaient alors de
« conséquences absolument dramatiques », l’interrogation du Haut
Conseil de la Famille et la tiédeur de plusieurs dirigeants du PS, François
Hollande nuançait alors son propos, en évoquant une simple « modulation du
quotient familial ».
Puis,
pour ne prêter le flanc à aucune critique, François Hollande indiquait dans la
16ème de ses 60 propositions : « Je maintiendrai toutes les
ressources affectées à la politique familiale. J’augmenterai de 25%
l’allocation de rentrée scolaire dès la prochaine rentrée. Je rendrai le
quotient familial plus juste en baissant le plafond pour les ménages les plus
aisés, ce qui concernera moins de 5% des foyers fiscaux ».
Au
bout du compte, c'est une option à minima qui a été retenue. De 2 336 € pour
l’imposition des revenus de 2011, le plafond a été raboté à 2 000 € par
demi-part pour les revenus de 2012 (1 000 € par quart de part pour les enfants
de parents divorcés qui sont en résidence alternée). Mais les plafonds
spécifiques applicables dans certaines situations (ancien combattant, invalide,
veuf ayant élevé des enfants à charge...) demeurent inchangés. Par exemple, la
demi-part accordée aux anciens combattants reste plafonnée à 2 997 €. De même,
la part entière accordant aux parents isolés pour leur premier enfant à charge
reste à 4 040 €.
Tous
les contribuables ne sont pas concernés par cette réforme, mais uniquement ceux
qui déclarent un montant de revenus supérieur aux limites à partir desquelles
le plafonnement du quotient familial s'applique. Par exemple, pour un couple
avec deux enfants mineurs à charge, la mesure sera ainsi applicable à partir de
77 193 € de revenus déclarés. Pour un couple avec 3 enfants, à partir de 95 671
€, etc…
Au
total, un peu moins d’un million de foyers fiscaux seront impactés par cette
mesure et le gouvernement récupérera seulement 490 millions d'euros dont la
plus grande partie servira à financer la revalorisation de l'allocation de
rentrée scolaire 2012.
La vraie réforme abandonnée
Selon
une étude de la direction générale du Trésor, 10 % des ménages les plus aisés
captent 46 % de l'avantage fiscal représenté par le quotient familial.
A
budget égal, si celui-ci avait été supprimé et remplacé par un crédit d’impôt
pour toutes les familles auraient bénéficié de 607 € pour chaque enfant à
charge. 4,3 millions de ménages auraient été perdants (pour un montant moyen de
930 € par an) et 4,8 millions auraient été gagnants (pour un montant moyen de
830 € par an).
Cette
façon de faire aurait permis de réduire les inégalités entre les familles les
plus pauvres et les plus riches. Les familles modestes auraient vu leur niveau
de vie augmenter, notamment les 47% de familles non imposables qui ne
bénéficient d’aucun avantage fiscal chaque année.
Les
économies réalisées par l'abaissement du plafond permettent certes d'augmenter
exceptionnellement l'allocation de rentrée scolaire de 25% à un peu moins de 3
millions de familles mais elles représentent seulement un gain moyen de 75
euros par enfant et par an.
Que la
France abandonne le quotient familial, appliqué en Europe seulement par deux
pays (Luxembourg et Suisse) et qu’elle adopte un système de crédit d’impôt
comme le font déjà la Belgique, le Canada, l’Espagne, la Hongrie, l’Italie, les
Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque et l’Allemagne,
n’aurait pas été déraisonnable.
Et
qu’aujourd’hui, l’UMP ou l’UDI fraîchement créée défendent le maintien d’un
système favorisant les familles aisées n’est pas une surprise. Mais, ce qui
l’est davantage, c’est qu’après avoir parlé d’une remise à plat de la fiscalité
et de révolution fiscale, François Hollande maintienne en fait un système
injuste, se contentant d’un mini changement à la marge.
La
nouvelle disposition restera de plus toujours aussi inéquitable jusqu'à la
limite du nouveau plafond fixé. Elle offre un rendement limité et se
révèle plutôt incompatible avec la fusion de l'impôt sur le revenu et de la
CSG, une autre mesure fiscale contenue dans le projet du candidat socialiste
mais renvoyée à plus tard…
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