Dimanche
dernier, un quart des électeurs ont voté pour le Front National aux élections
européennes, provoquant un séisme politique ressenti partout en Europe et même
dans le monde.
S’il
ne faut en aucun cas stigmatiser les électeurs qui ont voté pour le parti de
Marine Le Pen, sans ignorer toutefois les limites de ce parti, il faut bien
davantage chercher à comprendre les raisons de ce succès, en écoutant notamment
ses électeurs qui méritent autant de respect que les autres…
Cela
fait plus de 30 ans que le PS et les radicaux de gauche, le centre, l’UMP (hier
le RPR) mènent notre pays dans ce qui ressemble de plus en plus à une impasse
au nom de la raison européenne.
En
1983, François Mitterrand et Jacques Delors avaient choisi l’orthodoxie
budgétaire, théorisé la désinflation compétitive et supprimer l’échelle mobile
des salaires qui protégeait jusqu’à cette date le pouvoir d’achat des salariés
et des retraités.
Au
début des années 90, gauche et droite, à tour de rôle, ont fait ensuite le
choix détestable de taux d’intérêt élevés, comme l’Allemagne qui affrontait un
léger regain d’inflation du fait de la réunification, envoyant au moins un
million de personnes au chômage pour défendre le franc fort !
En
2005, le PS et l’UMP ont ignoré le « Non » du peuple français au
traité constitutionnel européen (TCE) et ratifié le traité de Lisbonne fin
2007. Ne pouvant reprendre le texte du TCE qui remplaçait les deux grands
traités existants, un tour de passe-passe, inspiré par Valéry Giscard
d’Estaing, a permis de conserver les deux traités tout en les modifiant en
profondeur dans le traité de Lisbonne :
- le traité instituant la Communauté européenne (Rome, 1957), rebaptisé « traité sur le fonctionnement de l'Union européenne »
- le traité sur l'Union européenne (Maastricht, 1992)
Et
aujourd’hui, les choix politiques de François Hollande ne sont que les
descendants directs de ceux des décennies précédentes ! Face aux résultats
désastreux de ces politiques d’austérité qui provoquent envolée du chômage et
paupérisation croissante des actifs et des retraités, il est bien logique que
les Français cherchent à exprimer leur colère par leur vote, d'autant plus que
PS et UMP se distinguent par leur absence complète de remise en question.
Cette
colère qui est sortie des urnes le 25 mai est plus forte chez les classes
sociales les plus touchées par les politiques menées, notamment les jeunes et
les ouvriers. En effet, plus les personnes sont protégées, moins elles sont
susceptibles de voter pour le FN.
Ce vote
est de plus en plus un vote social comme le démontrent remarquablement Emmanuel
Todd et Hervé Le Bras dans leur livre « Le Mystère français ». Il est
directement corrélé au degré de souffrance à l’égard de la mondialisation. Les
classes populaires, en votant pour le FN, expriment un rejet des politiques
menées par le PS et l’UMP, sous couvert de l’Union Européenne.
Mais
ce faisant, il y a aussi une part d’adhésion au discours du FN, notamment sur
les questions liées au caractère anti-démocratique de la commission de
Bruxelles ou à la nécessité d’un contrôle des flux migratoires dans les
économies modernes. Le grand succès du FN, c’est d’avoir réussi à incarner une
opposition claire grâce à un discours fort mais aussi au traitement médiatique
dont a bénéficié Marine Le Pen.
Le FN a-t-il atteint son plafond électoral ?
Il
faut bien reconnaître que le plafond de verre historique du FN, que l’on
pouvait estimer autour de 18% ou 19% dans le passé, a été largement dépassé
lors de ces élections avec un taux de 24,8 %. Certes, la participation n’a été
que de 43%, ce qui relativise le score du FN qui a réuni nettement moins de
voix qu’à la dernière élection présidentielle (6 421 426 voix en 2012
contre 4 711 339 voix en 2014), soit un différentiel de
1 710 087 voix, ce qui est loin d’être négligeable. Et si l'on
calcule le pourcentage de voix obtenues par rapport au nombre d'électeurs
inscrits, le FN ne représente que 10,75% du corps électoral, soit 1 citoyen sur
10...
Néanmoins,
il ne faut pas oublier que la participation a tendance à être plus faible dans
les catégories sociales où le FN est fort. La question qui se pose alors, c’est
de savoir si ce plafond a été simplement déplacé ou s’il a été carrément cassé,
au point où les routes du pouvoir pourraient s’ouvrir en France pour le parti
de Marine Le Pen.
Le
contexte exceptionnel (6 ans consécutives de crise) et le fait que
traditionnellement les élections européennes sont l’occasion de surprises,
poussent à considérer ce score avec prudence. Si c’est une chose de voter
pour des parlementaires européens au pouvoir extrêmement limité, c’en est une
autre de voir le FN en tête à d’autres élections ou de dépasser un jour les 50%
à l'élection présidentielle.
S’il
est plus que probable que la majorité des électeurs du FN préfèrerait que ce
dernier surpasse à toutes les élections le niveau du PS et de l’UMP, des
sondages récents indiquent cependant que la crédibilité du parti n’est pas si
grande pour une organisation qui existe depuis 42 ans.
Mais
si l’on considère que la situation ne va pas vraiment s’arranger dans les
prochaines années, ce qui est malheureusement une hypothèse crédible, alors de
nouvelles révoltes électorales contre les partis dominants n’est pas à
exclure…
Les
résultats :
L’élection
ne se faisant pas en France à la proportionnelle intégrale mais avec une barre
de 5% pour accéder à la répartition de sièges, Debout la République (DLR) ou
Nouvelle Donne (ND) notamment n’ont aucun élu, malgré leur 7ème et 8ème
position.
- FN :
24,8 %
-
UMP : 20,8%
-
PS-RDG : 13,9%
-
UDI-Modem : 9,9 %
-
EELV : 8,9%
-
FdG : 6,3%
- DLR
: 3,8%
- ND :
2,9%
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