Le
gouvernement a acté une baisse de l'impôt sur le revenu dans le budget 2020.
Pour Gérard Darmanin, ministre des comptes publics, le quinquennat a d'abord
été marqué par une baisse de la fiscalité sur les entreprises et c'est
désormais aux ménages d'en bénéficier.
Mais
quand on sait que plus de 50% des foyers ne sont pas assujettis à l'impôt sur
le revenu et que les impôts indirects représentent plus de 65% des recettes
fiscales, on mesure tout le caractère relatif de ces mesures...
Emmanuel
Macron a annoncé une diminution de 5 milliards d'euros de l'impôt sur le revenu
(IR) pour les classes moyennes pour un gain moyen évalué à 350 euros pour 12
millions de foyers fiscaux soumis à la première tranche d'imposition.
Cette
baisse est programmée alors que dans le même temps le gouvernement d'Edouard
Philippe abuse et a abusé, notamment en 2018, de la vieille technique
d’augmentation des impôts indirects, utilisée depuis de nombreuses années
pour compenser la faiblesse des rentrées fiscales issues de l'IR. Ainsi
aujourd'hui, l'augmentation des impôts indirects et des taxes de toute sorte
touche tous les citoyens dans de nombreux domaines :
- Les alcools (pour une bouteille de vin, le total des taxes représente environ 20% du prix et 60% pour une bouteille de Whisky). Les taxes sur les alcools rapportent plus de 4 milliards d'euros…
- Les sodas (l'entrée en vigueur de la taxe soda a entraîné une hausse des prix de vente entre 4 et 9 % selon les produits pour des marques comme Coca-Cola)
- Les assurances
- L’audiovisuel
- La CSG (en 1990, son taux s'élevait à 1,1 % des revenus. Puis, sous Édouard Balladur, il est passé à 2,4 %. En 1996, Alain Juppé l'augmente à 3,4 %. En 1998, Lionel Jospin porte son taux à 7,5 %. Emmanuel Macron l'a porté à 8,3%...)
- La CRDS (petite sœur de la CSG) qui devait durer cinq ans mais qui fête sa vingt troisième année d'existence...
- Les forfaits et franchises médicales de toute sorte (participation de 1 € sur toutes les consultations ou analyse de biologie, franchise de 0,50 € sur chaque médicament ou acte paramédical, forfait hospitalier de 20 € par jour...)
- Les mutuelles (la hausse des grilles tarifaires est générale et plus particulièrement pour les plus de 60 ans qui devront s'acquitter d'une cotisation en hausse d'au moins 9,5%...)
- Les certificats d'immatriculation des véhicules
- Le contrôle technique des véhicules (alors que le prix devrait être le même pour tous les automobilistes, il varie du simple au triple selon les départements, pour une hausse moyenne de plus de 12 %...)
- La TICPE (4,7% des recettes budgétaires) représente 63% du prix de l'essence sans Plomb 95-E10 et 60% de celui du gazole…
- L'électricité (un des produits les plus taxés en France, avec une moyenne de 35% de la facture TTC…)
- Le gaz (augmentation de 44% de la taxe Intérieure sur le gaz naturel…)
- L'immobilier
- Les jeux
- Les spectacles
- Le tabac (le paquet de cigarettes passe à 10 € en 2020...). L’Etat prélève au total 83% de taxes qui rapportent plus de 15 milliards €, un montant record !
- Les taxes foncières (augmentation moyenne de 34,7% en 10 ans...)
- Les timbres (le prix du timbre vert est passé de 0,80 € à 0,88 € et celui du timbre rouge de 0,95 € à 1,05 € depuis le 1er janvier 2019...)
- Les transports
- La TVA (53,9% des recettes budgétaires) qui rapporte 2 fois plus que l’IR (25,3%)
- Etc.
Ce
sont ainsi plus de 65% des recettes fiscales qui touchent les consommateurs,
taxés par rapport à leur consommation et non par rapport à leur
revenu. Ces impôts indirects sont d’autant plus injustes
qu’ils touchent sans distinction tous les foyers, y compris ceux, qui
à cause de la faiblesse de leurs revenus, ne sont pas assujettis à l'IR.
Ils deviennent ainsi de moins en moins lourds au fur et à mesure que le
contribuable est plus aisé.
Et aujourd’hui, si le gouvernement d'Emmanuel Macron communique largement sur
la baisse de l’IR, il fait l'impasse sur le dossier de la fiscalité
indirecte et ce après avoir supprimé l’impôt de solidarité sur la fortune
(ISF) pour les familles les plus riches, supprimé l'exit taxe qui
était destinée à dissuader les Français d'installer leur foyer fiscal à
l'étranger et mis en place une taxe allégée sur les revenus financiers pour
près de 10 milliards d'euros au total.
Pour rétablir une vraie justice sociale, Il conviendrait avant tout de
faire une vraie réforme fiscale en réhabilitant l'IR tout en baissant les
impôts indirects :
- Augmenter le nombre de tranches de l’IR qui souffre toujours d'un manque cruel de progressivité avec seulement 5 tranches d’imposition : 0% (0 à 9 807 €), 14% (9 807 € à 27 086 €), 30% (27 086 € à 72 617 €), 41% (72 617 € à 153 783 €) et 45% (au-delà de 153 783 €).
- Fusionner les contributions CSG et CRDS avec l'IR, pour en faire un large impôt progressif acquitté par tous.
- Réduire drastiquement le nombre de niches fiscales qui pèsent plus de 70 milliards €, pratiquement autant de ce que rapporte l'IR, ce qui fait de la France un pays hors normes !
- Remanier la fiscalité du patrimoine qui doit être plus progressive et mieux contrôlée pour empêcher l’accumulation héréditaire du pouvoir économique et politique qui en découle.
- Lutter réellement contre la fraude et l’évasion fiscale qui sont d'une telle ampleur qu’elles posent un problème autant démocratique qu’économique. Selon le syndicat des finances publiques Solidaires, entre 60 et 80 milliards € de recettes fiscales sont perdues chaque année, du seul fait de la fraude fiscale, et 40 à 60 milliards € du fait de l'évasion ou de l'optimisation fiscale, tolérée par l'union européenne. Ce sont essentiellement les grosses entreprises et les riches particuliers qui en bénéficient car ils peuvent faire de gros investissements déductibles de l’Impôt ou user de l’existence des paradis fiscaux.
- Prendre en compte le revenu dans l’assiette des taxes foncière et immobilière afin de tenir compte de la capacité contributive de chacun.
- Baisser la TVA sur les produits de première nécessité.
- Réduire la TICPE qui est de 0,682 € par litre d'essence sans plomb !
- Adopter pour toute la France le régime d'Assurance Maladie d'Alsace-Moselle. Le taux de couverture base de la sécurité sociale alsacienne-mosellane est de 90 % (80 % pour les médicaments remboursés et 100 % pour l'hospitalisation (pas de forfait journalier).
- Etc.
Mais
contrairement à l’idée libérale communément répandue et chère à Emmanuel
Macron, ce n’est pas en réduisant l’IR pour les seuls ménages imposables et en
augmentant la fiscalité indirecte que l’on réduira les inégalités
sociales.
Et il n'est pas inutile de rappeler à ce sujet qu'en son temps, un seul homme
politique, en la personne de Pierre Mendès France, indiquait déjà qu'il fallait
réduire la fiscalité indirecte car elle risquait d'entraîner une paupérisation
grandissante des salariés. Cette prévision s’est avérée malheureusement exacte
avec une pauvreté de masse qui touche aujourd’hui près de 10 millions de
personnes...
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