En signant avec le Medef un accord « au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi », trois syndicats minoritaires (CFDT, CFTC et CFE-CGC) ont donné un aval anticipé aux réformes structurelles du marché du travail souhaités par le patronat mais également imposées par la Banque centrale européenne, la Commission européenne et le FMI, notamment dans le Sud de l’Europe.
Tout y est : baisse des salaires en cas de menace sur l’emploi, prédominance de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche et sur la loi, facilitation des mobilités forcées et des licenciements…
Tout y est : baisse des salaires en cas de menace sur l’emploi, prédominance de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche et sur la loi, facilitation des mobilités forcées et des licenciements…
Cet accord ressemble étrangement à celui intervenu à propos de la réforme Fillon du 21 août 2003 sur les retraites, avalisée par ces mêmes organisations syndicales qui croyaient naïvement que ce texte pouvait assurer l'équilibre financier des régimes de retraite à l'horizon 2020 mais qui n’a bien sûr pas produit les effets escomptés. Par leur signature, ces trois confédérations syndicales avaient alors aggravé la situation des futurs retraités en avalisant un allongement progressif au-delà de 40 ans de la durée d’assurance pour obtenir une pension à taux plein.
Aujourd’hui, à nouveau, la CFDT, CFTC et CFE-CGC pensent candidement que l'accord sur la réforme du marché du travail, signé le 11 janvier dernier, protégera les salariés dans la tourmente de la crise économique alors qu’il confirme avant tout la possibilité, déjà adoptée par la majorité UMP précédente, d’accords d’entreprise dits de « maintien dans l’emploi », avec une baisse des salaires, en cas de « graves difficultés conjoncturelles ».
Les salariés qui refuseraient la baisse de salaire seraient licenciés pour « motif personnel », exonérant l’entreprise de toute obligation de reclassement. De même, tout salarié qui refuserait un changement de poste ou une mutation géographique pourra être licencié pour « motif personnel », dès lors que l’entreprise a signé un accord sur la mobilité.
La « sécurisation des licenciements » tant souhaitée par le Medef se traduit aussi dans l’accord par une réduction des délais de contestation des plans sociaux et des licenciements, ainsi que par une priorité donnée à la conciliation prudhommale, avec des indemnités minimes dont l’acceptation par le salarié interdit ensuite toute poursuite judiciaire.
Plus profondément encore, l’accord du 11 janvier dynamite toute la législation sur les plans sociaux : un accord d’entreprise peut prévoir une procédure totalement différente de celle prévue par la loi. Et s’il ne parvient pas à obtenir la signature des syndicats, l’employeur peut déposer son plan social à l’Inspection du travail, qui doit motiver un éventuel refus dans un délai de 2 à 4 mois.
En guise de contreparties, l’accord prévoit essentiellement un renchérissement limité des CDD de très courte durée (moins d’un mois), la généralisation de la complémentaire santé pour les salariés des PME et une majoration de 10% pour les heures complémentaires des salariés à temps partiel. Des avancées qui seraient appréciables si elles n’étaient pas payées aussi cher...
La France et l’Europe s’enfoncent dans une grave récession, provoquée par les politiques d’austérité et la frilosité des banques qui réduisent leurs crédits pour préserver leur bilan.
Les brèches ouvertes par l’accord du 11 janvier ne vont certainement pas « accélérer la création d’emploi » comme l’annonce le gouvernement de Jean-Marc Ayrault ; elles vont plutôt faciliter les licenciements qui s’annoncent et accélérer la montée du chômage. Le Wall Street Journal félicite d’ailleurs les patrons français d’avoir « gagné une nouvelle flexibilité », c’est tout dire…
Face aux graves dangers que présente cet accord, il est primordial d’informer tous les salariés ou futurs salariés de son contenu précis et d’intervenir auprès du parlement qui doit jouer tout son rôle et ne pas s’engager dans la voie de ratification d’un pareil texte.
Rien n’aboutira avant mai 2013 (le temps des ratifications, du conseil d’état, du conseil des ministres, des deux assemblées et des recours éventuels). Il y a donc encore un peu de temps pour s’opposer à cet accord car l’encensement des « bienfaits » de ce texte par les médias notamment ne pourra pas durer éternellement…
Sur le plan européen, les nombreuses forces syndicales et associatives européennes engagées dans le processus d’Alter sommet se réuniront début juin à Athènes en vue d’affirmer haut et fort que d’autres alternatives à la crise sont possibles.
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