Au
lendemain de la décision du Parti socialiste d’organiser une primaire les 22 et
29 janvier 2017, François Hollande compris, le patron du Parti socialiste,
Jean-Christophe Cambadélis et le Premier ministre, Manuel Valls, ont défendu
une « innovation démocratique ».
Ce qui était qualifié hier d’hypothèse fantaisiste par le Parti socialiste est aujourd’hui présenté comme une solution exemplaire…
Ce qui était qualifié hier d’hypothèse fantaisiste par le Parti socialiste est aujourd’hui présenté comme une solution exemplaire…
Dans
l’esprit des concepteurs de la primaire, le scrutin doit permettre de redorer
le blason du président, d’éliminer des risques gênants sur l’aile gauche du PS,
avec un ou plusieurs candidats frondeurs, et sur l'aile
droite avec Emmanuel Macron, tenté lui aussi par une candidature.
Le
numéro 1 du PS a vanté une initiative avant-gardiste dans le paysage politique
français : « le Parti socialiste a inventé la primaire pour une
présidentielle française, en 2011. Tout le monde l’a imité. Il invente la
primaire pour un président sortant, tout le monde l’imitera », a-t-il
indiqué sur Twitter.
Le
Premier ministre, quant à lui, candidat lors de la première primaire
ouverte du PS en 2011 a dépeint ce processus comme une voie vers l’unité, car
« il s’agit d’être au second tour de la présidentielle ». Un tel
scrutin ne dévalorise-t-il pas le statut du président ? « Qu’y-a-t-il de
dévalorisant à retourner devant les Français, à défendre ses idées, à expliquer
son action ? C’est cela, la démocratie ! » a plaidé le locataire
de Matignon.
Mais
d’autres ne l’entendent pas de cette oreille. Le député Richard Ferrand, proche
du ministre de l’Economie, a lâché sur Twitter : « Soumettre le président
sortant à une primaire enterre l’esprit de la 5ème République et fait primer la
casting sur la vision et le projet ».
Même
son de cloche à droite, qui imitera le PS en novembre 2017 en menant sa première
primaire. « Pour Monsieur Hollande, repasser par sa petite case départ est
la manifestation de son échec », a déclaré notamment Jean-Pierre
Raffarin.
De qui se moque-t-on ?
Il y a
quelques mois, l’exécutif gouvernemental et le Parti socialiste se montraient
réservés, voire opposés à l’idée d’une primaire. Aujourd’hui, changement de
braquet, la primaire aurait toutes les vertus.
Que
s’est-il passé entre temps ? Les sondages confirmant la dégringolade du
président de la République dans les intentions de vote, la candidature de
François Hollande n’est plus considérée comme certaine. La chute de
la popularité du Président est telle qu'elle le met à un niveau jamais
atteint sous la Vème République. La possibilité qu’au premier tour de
l’élection présidentielle de 2017, Jean-Luc Mélenchon dépasse Hollande est
désormais à envisager.
Dès
lors, Jean-Christophe Cambadélis, avec l’accord préalable sans doute de
François Hollande, a ressorti cette idée de primaire car il faudra bien choisir
un candidat de la gauche de gouvernement si le président sortant n’est pas
candidat à sa propre réélection.
La
réflexion personnelle de François Hollande et sa décision finale, qu’il doit
annoncer officiellement mi-décembre, pourrait être en fait déjà prise et
communiquée à Jean-Christophe Cambadélis. Ce dernier a donc lancé la
primaire de la " Belle Alliance Populaire " (BAM), ouverte uniquement
au PS, Radicaux de gauche et Verts pro-gouvernementaux. Mais il reste
encore à connaître les modalités exactes d'organisation car
des surprises pourraient être au RV. Le Premier secrétaire du PS a eu
en effet cette phrase inquiétante pour les partisans d’une vraie primaire
ouverte : " Nous sommes obligés de faire une primaire dans l'urgence.
[…] Je l'avoue dès maintenant, il n'y aura pas autant de votants que la
dernière fois, je ne vois pas comment on pourrait l'obtenir "...
Dans
tous les cas, l'échec cuisant du quinquennat est déjà acté par bon nombre
d'observateurs politiques, y compris au sein même des proches du président
de la République qui aura dit et redit au cours de son quinquennat
qu'il faut " réformer " la France, en chœur avec ses
différents Premiers ministres, ministres et secrétaires d’Etat.
Les «
60 engagements pour la France », annoncés pendant la campagne électorale,
détaillés lors de l'émission « Des paroles et des actes » sur France 2,
touchaient à la croissance et l'emploi, les services publics, le logement,
l'éducation, les institutions, la santé et la protection sociale, la
finance, la sécurité et la justice, la fiscalité, l'immigration, l'international
et l'égalité.
Mais
la plupart de ces engagements ont été vite oubliés, le mot « réforme » étant
galvaudé par François Hollande, comme il l’a été par son prédécesseur et
aujourd’hui par les journalistes des grands médias, les instituts de sondage ou
les experts de tous bords. Les dispositions législatives ou administratives
qualifiées de " réformes " ont été le plus souvent des
changements en pire, des mesures purement comptables se
terminant presque toujours par un recul des droits des citoyens et/ou une
baisse du pouvoir d’achat des salariés et des retraités.
Changer les institutions
de la 5ème République, modifier le mode d'élection des parlementaires,
réduire le mille-feuille administratif, réformer l'impôt sur le
revenu et la fiscalité locale, réduire la fiscalité indirecte, changer
le mode de financement de la Sécurité sociale, rétablir les allocations
familiales dès le 1er enfant, refondre l'indice officiel des prix à la
consommation, etc., les domaines où règnent archaïsme et injustice sociale ne manquaient
pourtant pas. Il aurait fallu engager, dès le début du quinquennat,
de véritables réformes dans tous ces domaines et bien d’autres encore afin
de renouer avec la République, la démocratie et la justice sociale,
en apportant des réponses sérieuses aux difficultés que rencontrent des
millions de Français et leurs familles.
Il est
important de se rappeler du constat, maintes fois vérifié par le passé, selon
lequel si les réformes essentielles à mettre en œuvre ne sont pas engagées dans
les six premiers mois qui suivent l’installation d’un nouveau gouvernement,
elles ne se font en général jamais. Cela s’est hélas confirmé pendant ce
quinquennat où, dès la fin de l’année 2012, il était clair que les réformes
nécessaires, notamment celle d’une grande réforme fiscale, étaient déjà
enterrées.
Avec
un tel bilan, il semble dès lors improbable que François
Hollande remporte la prochaine élection présidentielle et soit même qualifié
pour le second tour. Mais pour ses promoteurs, une primaire de
la gauche gouvernementale, éventuellement sans François Hollande, pourrait être
finalement la moins mauvaise solution pour le Parti socialiste...
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