Il s’agit d'abord de privilégier leurs intérêts financiers mutuels pendant que les désastres climatiques continuent à frapper la planète...
La course à l’espace entre milliardaires s’intensifie depuis plusieurs années.
Elon Musk, de SpaceX,
veut coloniser la planète Mars et affirme que la mission de sa société spatiale
est de mettre en place l’infrastructure nécessaire à cette fin. Il souhaite que
l’humanité devienne une espèce « multiplanétaire » et qu’une colonie
martienne soit un plan de secours au cas où la Terre deviendrait inhabitable.
De son côté, Jeff
Bezos ne se consacre pas à la colonisation de la planète rouge. Il pense plutôt à construire
de grandes structures en orbite terrestre où la population humaine pourrait
atteindre un trillion de personnes sans nuire davantage à l’environnement de la
planète.
Au-delà de ces discours
optimistes, aucun de ces avenirs n’est attrayant. La vie sur Mars serait
épouvantable pendant au moins des centaines d’années et tuerait probablement
une grande partie des personnes ayant fait le voyage, tandis que la technologie
nécessaire à la création de colonies spatiales massives n’existe pas et ne sera
pas non plus réalisable avant longtemps.
Mais alors que ces
milliardaires ont les yeux tournés vers les étoiles et que les médias les couvrent
de gros titres, les preuves de l’évolution rapide et négative du climat
s’accumulent.
Vers la fin du mois de
juin, Jacobabad, une ville de 200 000 habitants au Pakistan, a connu des
conditions de « bulbe humide » où une forte humidité et des
températures caniculaires se combinent pour atteindre un niveau où le corps
humain ne peut plus se refroidir.
A l’autre bout du
monde, sur la côte ouest de l’Amérique du Nord, un dôme de chaleur aggravé par
le changement climatique a fait grimper les températures à tel point que la
ville de Lytton, en Colombie-Britannique, a atteint 49,6 °C, battant de 4,6 °C
le précédent record de température au Canada, avant d’être réduite en cendres
par un incendie de forêt.
Le contraste est
frappant. D’un côté, des milliardaires s’engagent dans un concours pour voir
qui évoluera le premier dans l’espace et de l’autre des êtres humains qui doivent
de plus en plus faire face aux conséquences du réchauffement climatique.
Le partenariat spatial public-privé
Même s’il est vrai que
Jeff Bezos et Elon Musk se font effectivement concurrence, ils ont d’importants
intérêts financiers en commun. En 2004, Bezos et Musk se sont rencontrés pour
discuter de leurs visions respectives de l’espace, ce qui a amené Musk à
qualifier les idées de Bezos de « stupides ». À la suite de cette
discussion, ils s’invectivent de temps à autre, échanges dont les médias se
régalent, mais ils travaillent toujours à faire progresser une industrie
spatiale privée dont ils ont tous deux à gagner.
Les années de
compétition entre SpaceX et Blue Origin au sujet des plateformes
d’atterrissage, des brevets et des contrats de la NASA montrent ce qu’est
réellement la course spatiale des milliardaires. L’exemple le plus récent est
un contrat de 2,9 milliards de dollars de la NASA attribué à SpaceX pour
construire un atterrisseur lunaire. Dans la foulée, le Congrès a envisagé
d’augmenter le budget de la NASA de 10 milliards de dollars.
Dans un rapport publié
en 2019, Space Angels a estimé que 7,2 milliards de dollars avaient été versés
à l’industrie spatiale commerciale depuis 2000 et a spécifiquement désigné
SpaceX comme une entreprise dont le succès initial dépendait des contrats de la
NASA.
Ces entreprises
spatiales privées ne se contentent pas de nouer des relations avec l’agence
spatiale publique. SpaceX a remporté un contrat de 149 millions de dollars du
Pentagone pour la construction de satellites de suivi des missiles, et deux autres
contrats d’une valeur de 160 millions de dollars pour l’utilisation de ses
fusées Falcon 9. Elle a également remporté un contrat initial de 316 millions
de dollars pour fournir un lanceur à la Force Spatiale des Etats-Unis.
Pour couronner le
tout, SpaceX a obtenu 900 millions de dollars de subventions de la part de la
FCC (Commission Fédérale des Communications) pour fournir de la technologie de
large bande en milieu rural grâce à ses satellites Starlink, dont la réputation
n’est plus à faire.
Ainsi, malgré tous les
louanges faits aux entreprises spatiales privées et aux milliardaires de
l’espace, elles restent fortement dépendantes de l’argent du
gouvernement.
Si SpaceX a réussi à
remporter ces contrats, c’est en partie parce que Musk n’est pas un inventeur
mais un spécialiste du marketing. Il sait comment utiliser les relations
publiques pour attirer l’attention des gens, ce qui lui permet de remporter des
contrats lucratifs. Il sait également quelles sont les choses à ne pas mettre
en avant, comme les contrats militaires potentiellement controversés qui ne
font pas l’objet de tweets ou de vidéos d’annonce tape-à-l’œil.
Dans ce contexte, il est essentiel de voir qu'au-delà de ce spectacle de la course à l’espace des milliardaires il y a urgence avant tout de résoudre la crise climatique avant qu’il ne soit trop tard…
(Merci à Paris
Marx, animateur du podcast Tech Won’t Save Us pour une partie de ces infos)
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