20 août 2016

2006-2016 : 10 ans de racket des sociétés d’autoroutes !

Le péage s'applique principalement aux liaisons interurbaines
Il y a 10 ans, Dominique de Villepin, Premier ministre de Jacques Chirac, bradait les sociétés d'exploitation des autoroutes françaises au bénéfice de quelques multinationales du BTP, françaises et étrangères. 

Une spoliation de bien public qui privait le pays du bénéfice d'infrastructures payées par les impôts des citoyens et rendait ainsi impossible la gratuité de circulation sur le réseau autoroutier, pourtant promise initialement par l'Etat...


A l'origine, les péages autoroutiers devaient servir à rentabiliser les investissements consentis pour construire les autoroutes mais ces grands axes de circulation sont amortis depuis longtemps. Il n'est donc plus nécessaire d'augmenter les tarifs des péages et il serait même tout à fait justifié qu'ils soient réduits de façon significative. Or, non seulement, les tarifs continuent d’augmenter régulièrement mais sur deux tronçons d'autoroute, à peu près identiques en longueur, le prix du péage au kilomètre peut varier de 1 à 5. 

Le processus de privatisation des autoroutes a été engagé, en octobre 2001, par Laurent Fabius, lorsqu'il était ministre des Finances du gouvernement de Lionel Jospin. Une seule société d'autoroutes, Cofiroute, était alors privée. L'opération lancée par Laurent Fabius concernait les Autoroutes du Sud de la France (ASF) et la mise en Bourse, le 28 mars 2002, de 49 % de son capital qui avait rapporté 1,8 milliard d'euros à l'Etat. La société des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (SAPRR) et celle des autoroutes du Nord et de l'Est de la France (SANEF) ont été introduites en bourse en novembre 2004 et mars 2005. 

Puis, annoncée le 8 juin 2005 par le Premier ministre, Dominique de Villepin, la privatisation totale des sociétés d'autoroutes a été lancée officiellement via un appel à candidatures le 18 juillet suivant (14 milliards d'euros au lieu du prix de vente minimum de 24 milliards estimé par la Cour des comptes). Elle a été rapidement mise en œuvre ensuite par décrets en 2006. Au passage, les banquiers d'affaires ont eu droit à d'importantes commissions. 

Régulièrement la Cour des comptes a dénoncé ce qui s'apparente à du racket et même à une situation de rente digne de l'Ancien régime, pointant des hausses tarifaires injustifiables. Ses rapports réguliers, ainsi que ceux de l’Autorité de la Concurrence, ont ainsi démontré que les sociétés françaises d’autoroutes affichent une rentabilité exceptionnelle qui ne se justifie ni par leurs coûts ni par les risques auxquels elles sont exposées. 

La route est un bien public mais, comme toujours, les missions de service public confiées à des opérateurs privés, à l'image d'autres secteurs, comme la distribution de l'eau potable, se traduisent par une augmentation non justifiée des prix au détriment des utilisateurs ou des consommateurs. Les sociétés d’autoroutes invoquent bien l'argument du coût de l'entretien mais celui-ci représente une part infime et ne résiste pas à l'examen des bilans annuels qui démontre que les taux de rentabilité atteignent des records, dans certains cas, de plus de 60% !

Malgré l’opacité de la gestion pratiquée par les concessionnaires, la Cour des comptes a mis en lumière notamment la fameuse technique dite du « foisonnement ». A chaque augmentation des tarifs de péages, les concessionnaires disent respecter le cahier des charges en indiquant que le système des prix était inhérent au système tel qu'il avait été conçu avant même la privatisation. De plus, chaque société possède sa propre méthode de calcul, ce qui complique encore un peu plus la compréhension des prix pratiqués. 

En clair, l'Etat fixe un taux global d'augmentation pour chaque société, qui choisit ensuite d'augmenter plus ou moins certains tronçons. Les tronçons où il y a le plus de trafic sont les plus chers, ce qui permet de donner un coup de pouce à leurs résultats, tout en respectant les consignes de l'Etat. Par exemple, si l’on emprunte le tronçon de l'A64N entre Chapitre et Muret Nord, il faut débourser près de quatre fois plus que sur le tronçon Nîmes Ouest-Arles sur l'A54, qui est pourtant loin d'être le moins cher.  

En 2015, devant cette situation de plus en plus insupportable, la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal souhaitait un gel des tarifs autoroutiers. Elle avançait l’idée que les sociétés d'autoroutes pourraient baisser leurs tarifs de péage en cas de covoiturage. 

Dans un courrier envoyé à Manuel Valls, 152 députés socialistes, ont même proposé à l'État de racheter les autoroutes privatisées en 2006. Une nationalisation temporaire qui durerait un an, le temps de ré-attribuer la gestion des autoroutes à des opérateurs privés mais à des conditions plus favorables pour les pouvoirs publics. 

Tant et si bien que le Premier ministre, Manuel Valls, s'est senti obligé de hausser faussement le ton en  menaçant de résilier les contrats existants et en commandant un rapport parlementaire pour finalement obtenir quelques vagues assurances contre... l'allongement de la durée des concessions ! 

Une majorité d’automobilistes attendaient plutôt l’annonce d’une annulation pure et simple des privatisations et le rachat de ces sociétés d’autoroutes par l’Etat au prix où elles ont été vendues en 2006, éventuellement augmenté des quelques investissements faits par ces sociétés.

Mais ni la renationalisation pure et simple, ni la nationalisation temporaire proposée par plus de la moitié des élus PS à l'Assemblée nationale, mesures pourtant de justice élémentaire et d'intérêt général évident ne seront prises par François Hollande et Manuel Valls…


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