14 décembre 2009

L'histoire-géographie est indispensable à la construction intellectuelle du futur citoyen

Gibraltar (Alexandre Vuillemin - 1843)
Dans le cadre de la réforme des lycées, le Ministre de l’Éducation Nationale, Luc Chatel, a décidé de supprimer l’Histoire et la Géographie comme matières obligatoires en Terminale Scientifique.

On peut s’interroger sur la logique d’une telle suppression car dans le même temps le gouvernement prétend faire de la conscience nationale une priorité et va jusqu’à créer à cette fin un Ministère de l’Intégration…


Cette décision de retirer les cours d’Histoire-Géographie suscite la stupéfaction par son décalage avec les nécessités évidentes de la formation des jeunes Français en ce début de XXIe siècle.

A un moment où le président de la République et son gouvernement jugent urgent de lancer un grand débat sur l'identité nationale, cette mesure va priver une partie de la jeunesse française des moyens de se faire une opinion raisonnée sur l'histoire et de la géographie, grâce à une approche scientifique et critique. A l'heure de la mondialisation en effet, l'importance de ces matières, pour se situer dans le monde d'aujourd'hui, n’est plus à démontrer.

Luc Chatel propose bien de maintenir cette matière dans un cadre optionnel mais très peu d’élèves prendront en réalité une telle option. Tout le monde peut comprendre, au vu de ce qu’est un lycéen aujourd’hui, et plus particulièrement dans une section scientifique qu’une telle décision va aboutir à terme à la suppression totale de cet enseignement en Terminale S.

De plus, sans la connaissance de ces disciplines, cela risque d’être un handicap pour accéder à certaines formations supérieures de haut niveau.

Pour ces raisons, vingt universitaires et chercheurs, principalement des historiens, jugent "impératif d'annuler" cette décision "à courte vue" qui se trouve en contradiction avec les objectifs proclamés du système éducatif français sur le plan de la formation intellectuelle, de l'adaptation au monde contemporain et de la réflexion civique des futurs citoyens.

Parmi les signataires figurent les historiens Jacques Le Goff, Jean-Pierre Azéma, Antony Beevor, Jean-Jacques Becker, André Kaspi, Annette Wieviorka, Benjamin Stora et Jean Tulard mais aussi le philosophe Alain Finkielkraut.


A l'attention de : Monsieur le Ministre de l'Education nationale, Luc Chatel

Monsieur le Ministre, 

Dans le cadre d'une réforme des lycées que vous avez présenté le jeudi 3 décembre devant le Conseil supérieur de l'Education, vous avez proposé de rendre optionnel le cours d'Histoire-Géographie pour les classes de Terminale S. Nous entendons bien votre justification de cette "réforme" qui vise selon vous à rééquilibrer les différentes séries (S, L, ES), rendre l'orientation plus progressive, pouvoir changer de filière plus facilement, personnaliser l'accompagnement de tous les lycéens.

Pourtant, le sort que vous réservez au cours d'Histoire-Géographie en Terminale S nous semble prendre le contre-pied de la nécessaire réforme du lycée et précipiter nos lycéens et futurs citoyens dans une pure logique utilitariste de l'éducation. Nous considérons que l'Ecole est le lieu où tout se joue et où toutes les promesses pour notre pays peuvent mûrir, surtout à une époque où la mondialisation met en doute les fondements, en particulier culturels, de notre société.

De la qualité de notre enseignement aujourd'hui dépendra notre société de demain. 

C'est pourquoi le niveau d'exigence que nous portons pour notre système éducatif doit être le plus haut possible, tant en termes de préparation au monde professionnel que de formation générale, culturelle et personnelle destinée à conduire nos lycéens vers l'âge adulte.

De cet enseignement dépendront nos citoyens de demain.

Vous préférez insister sur la nécessité de se consacrer en Terminale à sa spécialité et à la préparation aux études supérieures. Avez-vous seulement songé au fait que l'enseignement supérieur, quel qu'il soit, exige des étudiants la capacité de se situer dans le temps et l'espace, de questionner le passé pour se forger un jugement ? L'Histoire-Géographie consacre cette distance et cette analyse.

De cet enseignement dépendra la capacité de nos étudiants à réfléchir par eux-mêmes.

A des têtes bien pleines nous préférons des têtes bien faites.

C'est pourquoi nous nous joignons à l'appel rédigé par d'illustres intellectuels et historiens pour vous demander, Monsieur le Ministre, de conserver le cours d'Histoire-Géographie dans son caractère obligatoire et de renforcer, comme vous les proposez, les dotations horaires de cette matière dès la classe de première.


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5 commentaires:

sauveur a dit…

Au moment du débat sur l'identité nationale et alors que ce gouvernement a pris l'habitude de kidnapper l'Histoire et la mémoire collective, cette décision unilatérale est gravisime et ressemble à un putsch idéologique.

Une véritable catastrophe !

hélène a dit…

Ma fille a fait une terminale S.

Le programme portait sur l'histoire contemporaine 1940 et suivantes si je me souviens bien, et cette discipline est indispensable pour asseoir les études supérieures sur de bonnes bases.

Et en effet, on peut se poser la question de : "pourquoi la supprimer".

Je suis entièrement d'accord avec vous, et profondément choquée que les enfants des générations à venir ne puissent bénéficier des mêmes avantages que les anciens élèves...

dimitri a dit…

Moi sans cette matière je n'aurais jamais compris l'histoire de la seconde guerre mondiale et par conséquent l'holocauste.

Vivement 2012 parce que là ça craint !!!

lionel a dit…

Un peuple sans histoire est un peuple sans avenir... mais je ne crois pas que ce soit de moi !

philippe a dit…

« Evidemment, car l'HG apprend a se situer dans l'espace et le temps.
C'est son abandon qui est de droite (cf "La fin de l'Histoire" de Fukuyama) »