L’accord
européen du 26 octobre dernier n’a rien résolu des problèmes de fond qui
taraudent l’Union européenne : une monnaie sans État, un État sans budget digne
de ce nom, une Union de plus en plus antidémocratique, une Banque centrale accrochée
à ses dogmes, des traités qui organisent la domination des marchés
financiers.
Les chefs d’Etat, principalement Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, ont voulu faire croire qu’on était sur la bonne voie, qu’ils s’étaient donné enfin les moyens de résoudre durablement la crise. En vérité, il n’en est rien surtout après l’annonce d’un éventuel référendum par le Premier ministre grec Georges Papandréou sur le très impopulaire plan de sauvetage adopté à Bruxelles…
Les chefs d’Etat, principalement Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, ont voulu faire croire qu’on était sur la bonne voie, qu’ils s’étaient donné enfin les moyens de résoudre durablement la crise. En vérité, il n’en est rien surtout après l’annonce d’un éventuel référendum par le Premier ministre grec Georges Papandréou sur le très impopulaire plan de sauvetage adopté à Bruxelles…
Les
créanciers privés, notamment les banques, devraient effacer 50 % de leurs
créances sur la dette publique grecque, soit 100 milliards d’euros.
Contrairement à ce que prétend Nicolas Sarkozy, cela ne signifie pas une
diminution de 50 % du montant de la dette publique grecque mais seulement une
diminution de 28 % car il faut prendre en compte toutes les dettes et pas
seulement celles des banques…
La
dette grecque s’élève à 385 milliards €, soit 160 % d’un PIB de 240 milliards
€. Elle devrait, demain, se réduire à 120 % du PIB mais demain, ce ne sera pas,
selon Angela Merkel, avant 2020…
Cette
restructuration est loin d’être suffisante. La preuve en est qu’un nouveau prêt
de plus de 100 milliards € sera accordé à la Grèce par le Fonds européen de
stabilité financière (FESF). Ce qui signifie que les dirigeants européens,
eux-mêmes, estiment que la Grèce ne pourrait pas retourner se financer sur les
marchés financiers à un taux normal avant plusieurs années.
Ce
nouveau prêt sera accordé sous des conditions qui durciront encore les plans d’austérité
imposés en contrepartie de l’octroi du premier prêt de 110 milliards € en 2010.
La diminution des intérêts et des remboursements de capital à verser chaque
année ne pourra pas être utilisée à relancer l’économie grecque qui en a
pourtant un besoin urgent après quatre années consécutives de récession. Cette
diminution sera utilisée pour réduire le déficit public et empêcher
(théoriquement) une nouvelle augmentation de la dette. Le risque que l’économie
grecque plonge dans une récession encore plus profonde (le PIB diminuera de 5,5
% en 2011) est donc loin d’être écarté. Or, un pays en récession ne peut que
voir sa dette publique augmenter : ses recettes fiscales diminuent, ses
dépenses augmentent et la dette en pourcentage du PIB augmente mécaniquement du
simple fait de la diminution du PIB.
Les
Etats et donc les contribuables vont éponger le coût de la recapitalisation des
banques
Le
lobby bancaire, l’International Institute for Finance (IIF), organisme privé,
siégeait à la même table que les dirigeants de l’UE pour décider du montant de
la décote sur la dette publique grecque qui serait demandé aux banques et des
modalités de recapitalisation de ces mêmes banques. Un bel aveu de la mise sous
tutelle de l’UE par la finance puisque les syndicats européens n’étaient pas
appelés à siéger à cette même table alors que les salariés européens sont
directement impactés par les plans d’austérité décidés ou impulsés par l’Union
européenne.
Le
Conseil de l’euro a décidé qu’en contrepartie de l’effacement de 50% de leur
créance, les banques seront recapitalisées, en priorité avec des fonds privés
mais très certainement avec des fonds publics. Aucune entrée des États dans le
capital des banques n’est prévue, en contrepartie du versement de fonds publics
!
Un
rapport de 2011 de la Commission européenne indique que les États-membres de
l’UE avaient versé 484 milliards d’euros aux banques pour leur
recapitalisation, le rachat d’actifs douteux, l’injection de liquidité et
avaient accordé des garanties sur les prêts interbancaires à hauteur de 757
milliards d’euros. Mais curieusement, ces chiffres ne trouvaient aucune
traduction au niveau de chacun des États-membres.
En
France, l’État aurait même gagné quelques centaines de millions d’euros en
prêtant aux banques. Pourtant, au gré des déconfitures de Dexia ou de Fortis,
des milliards d’euros dépensés et perdus par l’État, surgissent tout à coup
dans le débat public. Le montant des fonds versés aux banques est un véritable
secret d’État. Un débat démocratique sur la dette publique exigerait que ce
secret soit levé.
L’UE
estime à 10 milliards d’euros les besoins de recapitalisation des banques
françaises. Très exactement le montant des dividendes distribués entre 2008 et
2010 par les trois plus grandes banques françaises ! Pourquoi ces banques
n’ont-elles pas mis ces fonds en réserve plutôt que de continuer à verser des
dividendes, comme si la crise de 2007-2008 n’avait pas existé pour leurs
actionnaires ? Il devrait être hors de question que, d’une façon ou d’une autre,
ces banques fassent appel à des capitaux publics sans être aussitôt mises sous
la tutelle de l’État…
Le
fameux fonds européen de secours : un simple pare-feu
Pour
éviter que la crise de la dette publique grecque ne s’étende à l’Espagne et à
l’Italie, les capacités d’intervention du FESF ont été démultipliées, pour
faire face à la menace d’un défaut espagnol ou italien. On nous parle de 1000
milliards mais les dirigeants européens estiment que le FESF, même doté de cet
effet de levier, sera insuffisant pour « rassurer » les marchés financiers
puisqu’ils appellent déjà au secours pour renforcer ce fonds de secours.
Le
FMI, c’est-à-dire les États-Unis qui y disposent d’une minorité de blocage,
ayant refusé son financement au FESF, les dirigeants européens ont décidé de
faire appel à tous et en particulier au Brésil, à la Russie et à la Chine.
Le
Brésil a déjà répondu qu’il ne comptait pas vraiment s’engager dans cette
affaire.
La
Russie a fait la même réponse. Il est intéressant, au passage, de noter que si
l’UE s’adresse aujourd’hui à la Russie c’est parce que cette dernière a connu
une croissance moyenne de 6 % par an depuis l’annulation totale de sa dette
publique en 1998.
La
Chine pose ses conditions. Elle veut pouvoir obtenir le statut d’ « économie de
marché » avant la date butoir de 2016, fixée par l’Organisation mondiale du
commerce (OMC). Ce statut lui permettrait de lever tous les obstacles qui
existent encore à ses exportations vers l’Union européenne. Dépendant
financièrement de la Chine, il deviendrait très difficile pour l’Union
européenne d’exiger de cette dernière qu’elle applique les règlements de l’OIT
en matière de droit du travail, qu’elle réévalue un Yuan qui accentue encore
les effets de son dumping social ou qu’elle s’engage dans la lutte contre le
réchauffement climatique.
L’Union
européenne devant des choix décisifs
Tôt ou
tard l’UE devra affronter le problème de la domination des marchés financiers
qui a été patiemment et consciemment construite par les traités européens et
notamment par trois articles du traité de Lisbonne :
- L’Article 63 qui ouvre l’Union européenne à tous les capitaux mondiaux sans restriction. Cet article devrait être aboli et remplacé par l’instauration d’une taxe sur les transactions financières, suffisamment dissuasive pour diminuer de 75 à 80 % les transactions spéculatives actuelles ainsi que la mise en place d’un contrôle des changes à l’entrée et à la sortie de la zone euro.
- L’article 121 qui interdit à la BCE d’accorder des découverts aux États-membres et d’acquérir directement (lors de leurs émissions sur le marché primaire) les titres des dettes publiques. Cet article devrait être abrogé pour permettre à la BCE de stopper la spéculation contre les dettes publiques.
- L’article 125 interdit aux États-membres de se prêter entre eux et à l’UE de prêter aux États membres. Cet article devrait être également abrogé dans le cadre de la création d’un véritable budget européen, égal non à 1 % du PIB européen comme aujourd’hui, mais à 20 %, comme celui de l’État fédéral états-unien.
Ces
abrogations permettraient de trouver une solution au problème des dettes
publiques européennes en combinant la restructuration ou l’annulation des
dettes à la suite d’audits publics organisés démocratiquement.
A
défaut, bien évidemment, on va demander dès maintenant aux contribuables de
fournir des efforts considérables sur les retraites, le pouvoir d’achat, les
impôts. Là aussi, les mots utilisés ont pour objectif de manipuler les esprits,
car ces « fameux efforts » ne sont que des sacrifices inutiles. Loin de réduire
les déficits et la dette, ces nouvelles mesures vont à l’exemple de la Grèce
plonger le Sud de l’Europe et la France dans le cercle vicieux de la récession.
Tous
ces pays ne pourront pas s’en sortir pour la simple raison que l’on ne traite
pas la cause du mal. Comme un médecin qui assommerait le malade de médicaments
plutôt que d’enlever l’abcès qui devient purulent. La cause est le
libre-échange déloyal qui pousse aux délocalisations partout en Europe et dans
le monde. Il y a ensuite bien sûr un euro trop cher qui asphyxie les économies
du Sud et celle de la France, les empêchant de restaurer leur compétitivité…
Photo
Creative Commons
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire