La ferme dite des Mille vaches, située à
Buigny-Saint-Maclou dans la Somme, a annoncé qu’elle allait cesser sa
production de lait à partir du 1er janvier 2021.
Cette décision est d'abord la victoire de tous ceux qui dénoncent la souffrance animale et les dérives d’une industrialisation à marche forcée de l’agriculture…
C’est la responsable communication de la ferme des Mille vaches, Véronique Retaux, qui a annoncé la nouvelle : « Le modèle était viable à mille vaches, mais nous n’avons pas pu l’exploiter en raison des oppositions et des actions juridiques. Tout ce contexte n’offre pas la nécessaire visibilité à moyen terme. L’activité sera réorientée vers les cultures comme le blé, la betterave, les pommes de terre et les cultures fourragères. » a-t-elle déclaré à France 3 régions.
La
ferme va donc mettre fin à son activité laitière progressivement. Pendant
quinze jours, ses employés vont procéder au tarissement des 800 vaches de l’exploitation.
Cette opération consiste à les alimenter différemment pour qu’elles produisent
moins de lait. Ce lait, impropre à la consommation humaine, sera donné aux
veaux et génisses. Une partie des vaches seront ensuite vendues, les autres
iront à l’abattoir.
« C’est une satisfaction, dans le sens que le
mode de production ne nous plaisait pas. Il nous faut réfléchir d’avantage au
respect du bien-être animal. On est surpris que la ferme ait tenu aussi
longtemps », a précisé Francis Chastagner, porte-parole de
l’association locale Novissen, qui s’oppose à la ferme-usine depuis les
origines du projet en 2013.
L’histoire récente
La
ferme-usine des 1000 vaches était le symbole des dérives d’une
industrialisation à marche forcée de l’agriculture qui a vu
disparaître, entre 2000 et 2010, environ 40% des fermes
laitières en France alors même que la taille moyenne des troupeaux s’est
accrue de 48%.
Cette installation normalisait une souffrance animale insoutenable et amplifiait la précarisation du monde paysan en conduisant à vendre une nourriture de piètre qualité. Les vaches étaient parquées dans un univers concentrationnaire, bourrées d’antibiotiques avec un régime alimentaire modifié pour produire un maximum de lait. Pour les nourrir artificiellement, au lieu des pâtures favorables à leur bien-être et à leur bon équilibre général, on utilisait des aliments importés et/ou poussant avec engrais chimiques et pesticides.
Cette production
intensive de lait conduisait ainsi la vache à manger davantage et à pousser son
système digestif à ses limites. Une fermentation excessive dans le rumen,
provoque des cas de fourbure et augmente les taux d’abattage de
troupeaux.
La sélection génétique de vaches à haut rendement est en effet le facteur principal des problèmes de santé des vaches laitières, notamment concernant la fertilité et les maladies infectieuses, particulièrement la mastite. Les risques concernant la tuberculose sont aussi particulièrement élevés au vu de la taille et des conditions imposées dans ces fermes-usine.
Le promoteur de la ferme-usine des 1000 vaches était un entrepreneur du BTP, Michel Ramery qui a décroché de nombreux contrats dans la région Nord-Pas-de-Calais. En effet, ses liens avec le parti socialiste sont étroits, en particulier à Hénin-Beaumont, le symbole de la corruption des barons du PS. Il compte parmi ses soutiens le maire PS d’Abbeville et celui de Buigny-Saint-Maclou.
Une partie du lait était collecté par la branche belge de la société Ysco, qui fabrique des glaces, cônes, crèmes glacées et autres bûches de Noël sous marque distributeur.
En juin
2015, un employé licencié a révélé les mauvaises conditions dans lesquelles les
animaux étaient élevés (traites trop nombreuses, vêlages mal conduits et manque
d'hygiène) :
« Dans le troupeau, il y a au moins 300 vaches
qui boitent. Elles sont fatiguées, maigres. Elles ont des ongles trop longs ou
des sabots qui pourrissent. Elles marchent à longueur de journée dans leurs
excréments. D’habitude, on nettoie tous les deux jours dans ce type d’élevage,
là c’est tous les quinze jours. Les vaches sont sales. »
Les
conditions de travail des employés étaient, elles aussi, dénoncées :
« Quand je suis arrivé, il y avait une
comptable, une secrétaire, deux responsables et trente-trois employés. Quand je
suis parti, on n’était plus que quinze. Il y a deux équipes, celle qui
travaille de 5 h à 14 h 30 et celle qui travaille de 14 h 30 à minuit. »
En
août 2018, l’exploitation a été condamnée pour avoir dépassé le
nombre de vaches autorisé (300 vaches en trop, constat lors d’un contrôle en
2015), jugement confirmé en décembre 2019.
C'est donc une page qui se tourne après un long combat de plusieurs années. C’est aussi une décision importante pour tous les autres combats contre des projets industriels similaires actuellement en cours.
Un grand merci à tous ceux qui se sont battus pour le bien-être animal et qui ont contribué à cette victoire :
- L'association d'habitants Novissen
- Le syndicat agricole Confédération paysanne
- Les associations de protection animale telles que L214
- L'ONG Écologie sans frontière
- Europe Écologie Les Verts
- La France insoumise
- Les Patriotes
- Le philosophe Alain Finkielkraut
Photo Creative Commons
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